Bien que les Canadiens aient beaucoup en commun avec leurs voisins du Sud, comme leur longue frontière amicale, les éléments qui composent leurs cultures, leurs économies et des merveilles naturelles connues, d’importantes différences existent. Alors qu’on associe le baseball, la tarte aux pommes et des températures plus clémentes aux États-Unis, le Canada est reconnu pour son hockey, ses queues de castor et ses tempêtes de neige. Toutefois, si vous êtes un citoyen canadien qui envisage de déménager aux États-Unis, vous devez tenir compte de différences plus importantes, à commencer par celles liées aux impôts.
La Convention fiscale entre le Canada et les États-Unis atténue la plupart des risques de double imposition, mais certaines situations peuvent tout de même vous assujettir à des impôts des deux côtés de la frontière. Dans mon dernier billet, j’ai parlé de Robert, un client qui passe de longs séjours dans sa résidence secondaire en Floride, et j’ai présenté les calculs qui déterminent s’il peut alors être considéré comme un résident américain. En quelques mots, le temps qu’il passe aux États-Unis d’une année à l’autre fait varier son statut de résident américain.
À l’approche de son départ à la retraite, Robert, qui aime particulièrement le climat de la Floride, envisage sérieusement de s’installer pour de bon dans le Sunshine State. Évidemment, cette décision lui revient, mais voici un aperçu des éléments que je lui ai conseillé de prendre en considération avant qu’il se fasse une idée.
Le statut?
Ce n’est pas parce que Robert ne réside plus au Canada qu’il cessera d’en être un résident aux fins fiscales. En vertu du régime fiscal canadien, les obligations en matière d’impôt sur le revenu sont fondées sur le statut de résident. Si Robert est considéré comme un résident fiscal canadien, il devra donc payer de l’impôt sur son revenu gagné ailleurs qu’au Canada. Cependant, s’il est considéré comme un non-résident, il ne paiera de l’impôt que sur son revenu canadien.
Robert doit donc déterminer s’il a des « liens importants de résidence » avec le Canada, ce qui intéresse particulièrement l’Agence du revenu du Canada (ARC), qui définit ces liens comme suit : avoir au Canada un domicile, un époux ou conjoint de fait, ou des personnes à charge. Les liens de résidence secondaires pertinents comprennent les biens personnels (voiture ou meubles), les liens sociaux (affiliation à un organisme religieux) et les liens économiques (maintien de comptes bancaires canadiens).
En règle générale, Robert sera considéré comme un émigrant aux fins de l’impôt sur le revenu s’il quitte le Canada, s’installe de manière permanente aux États-Unis et rompt ses liens de résidence avec le Canada. S’il conserve certains liens avec le Canada, il pourra tout de même être considéré comme un non résident en démontrant qu’il possède des liens plus forts avec les États-Unis en vertu des règles subsidiaires de la Convention fiscale entre le Canada et les États-Unis. Cela dépend de différents facteurs, notamment l’emplacement du domicile permanent de Robert ou de ses centres d’intérêt.
L’impôt de départ
Si Robert émigre du Canada, on considérera qu’il a vendu certains biens, comme des actions, des œuvres d’art et des collections – même si ce n’est pas réellement le cas – à leur juste valeur marchande, et qu’il les a acquis de nouveau au même montant. Cette « disposition réputée » l’assujettirait à un impôt de départ sur ses biens (ou à un impôt sur les gains de capital) avant son déménagement aux États-Unis. Il existe cependant certaines exceptions, notamment en ce qui concerne les biens immobiliers canadiens, les régimes de retraite et certaines participations dans des fiducies.
Robert devra également réfléchir aux types d’investissements commerciaux qu’il a faits au Canada. Par exemple, s’il possède plus de 50 % des actions d’une société et qu’il transfère la gestion et le contrôle de celle-ci aux États-Unis, ou s’il détient une participation dans une société de personnes au Canada, il pourrait devoir assumer d’importantes répercussions fiscales. Je ne peux pas entrer dans les détails relativement à la situation de Robert, mais pour ce qui est de gérer un fardeau fiscal global, certaines entités choisissent de liquider ou de restructurer certains actifs avant d’émigrer, ce qui peut s’avérer une solution avantageuse.
Le transfert du fardeau fiscal
Il est également important que Robert se penche sur l’impôt successoral américain. Au moment de leur décès, les citoyens et les résidents non américains sont assujettis à l’impôt successoral américain [PDF 401 Ko] sur la juste valeur marchande de certains biens situés aux États-Unis. Il pourrait notamment s’agir de biens personnels, de voitures, de bateaux, d’actions de sociétés américaines publiques ou privées et de régimes de retraite américains. Toutefois, cela diffère pour les citoyens et les résidents américains (c.-à-d. les personnes domiciliées aux États-Unis) : à leur décès, ils sont assujettis à l’impôt successoral américain sur leur succession à l’échelle mondiale.
À titre de résident canadien qui n’est pas citoyen américain, Robert serait uniquement assujetti à l’impôt successoral américain sur ses biens situés aux États-Unis. Cependant, s’il décide de s’installer chez nos voisins du Sud de façon permanente, il est probable qu’il soit considéré comme un résident américain aux fins de l’impôt successoral.Il serait alors assujetti à l’impôt successoral américain sur sa succession à l’échelle mondiale.
Maintenant, si Robert est un citoyen ou un résident non américain et que la valeur de ses biens situés aux États-Unis s’élève à 60 000 $ US ou moins au moment de son décès, il ne sera pas assujetti à l’impôt successoral américain. Si la valeur de la totalité de sa succession, y compris ses actifs à l’échelle mondiale, s’élève toutefois à 13,61 millions de dollars américains ou moins à son décès, il ne sera pas non plus assujetti à l’impôt successoral américain en raison d’un crédit d’impôt supplémentaire offert en vertu de la Convention fiscale entre le Canada et les États-Unis.
En outre, si Robert est un citoyen américain aux fins de l’impôt successoral au moment de son décès, ses successeurs pourront se prévaloir du montant de l’exonération de l’impôt successoral applicable (actuellement 13,61 millions de dollars américains) pour réduire l’impôt successoral américain qu’il doit payer.
Je me suis aussi assuré d’informer Robert de ce qui suit :
- Les taux d’imposition sur les successions varient de 18 % à 40 %
- Le montant de l’exonération de l’impôt successoral change chaque année. Il est donc recommandé de revoir périodiquement son exposition à l’impôt successoral américain et de prendre les mesures nécessaires
- Le montant de l’exonération de l’impôt successoral sur les actifs s’établira à 5 millions de dollars américains (ajusté en fonction de l’inflation) à compter du 1er janvier 2026, à moins que des modifications législatives ne soient apportées
Encore et toujours des décisions
Bien que les Canadiens et les Américains se ressemblent à bien des égards, la fiscalité transfrontalière change la donne. En fin de compte, il incombe à Robert (et à tous les Canadiens qui envisagent un déménagement similaire) de prendre le temps d’évaluer ses affaires financières et de garnir sa trousse à outils, que ce soit en consultant les renseignements offerts par l’ARC et l’Internal Revenue Service, ou en communiquant avec moi ou un autre membre de l’équipe du Bureau de gestion familiale de KPMG pour obtenir des conseils. Lorsque vous gérez votre situation fiscale de façon proactive, vous pouvez vous adapter en toute confiance aux changements à venir et jouir pleinement de votre vie, que vous prévoyiez de la passer au nord ou au sud du 49e parallèle.