EUDR : un an de plus pour transformer la contrainte en opportunité stratégique pour les entreprises

      La Commission Européenne a proposé le décalage d’une année de la date d’application du règlement européen contre la déforestation et la dégradation des forêts.

      Publié le 24 octobre 2025

      Un règlement contraignant

      Pour tenter d’endiguer la déforestation, l’Union européenne a instauré un règlement visant à garantir que les chaînes d'approvisionnement des entreprises ne contribuent pas à la destruction des forêts : l’EUDR (European Union Deforestation Regulation). Sa date d’application est encore incertaine. En effet, ce règlement qui, dans l’état actuel de la réglementation, devait prendre effet au 30 décembre 2025, verra probablement son application reportée au 30 décembre 2026 si la proposition faite en ce sens par la Commission Européenne est adoptée.

      Ce délai supplémentaire, s’il est validé, offrira aux entreprises l’occasion de mener une réflexion plus approfondie sur la façon dont la mise en œuvre de cette réglementation peut constituer une véritable opportunité stratégique.

      Une fois entré en application, le règlement concernera toutes les entreprises qui importent ou exportent des marchandises depuis l’UE, ou en mettent à disposition sur le marché de l’UE, quelle que soit leur forme juridique ou leur taille (avec des obligations réduites pour les PME).

      Pour importer, mettre sur le marché de l’UE ou exporter depuis celui-ci les produits couverts par l’EUDR, les entreprises devront démontrer que ceux-ci remplissent deux conditions :

      Ne pas avoir été fabriqués à partir de matières produites sur des terres déboisées ou dégradées ;

      Avoir été produits en conformité avec les lois du pays de production, y compris en matière de droits de l'Homme et de droits des populations autochtones concernées.

      Les produits concernés par le règlement sont :

      • Le cacao, le chocolat et les produits à base de chocolat
      • Le café
      • Le soja
      • L'huile de palme et ses dérivés
      • Le bois et ses dérivés
      • Le caoutchouc et ses produits dérivés (courroies, joints, etc.)
      • Les produits issus des bovins (bétail, viande, peaux et cuir)

      Quelles sont les obligations pour les entreprises ?

      Dans le cadre du règlement, les entreprises ont l’obligation de :

      Mener une diligence raisonnée pour s’assurer que les produits sont conformes aux exigences de l’EUDR (collecte d’informations, analyse de risque, élaboration de mesures d’atténuation des risques...) ;

      Produire une déclaration de diligence raisonnée pour toutes les matières premières et tous les produits visés mis à disposition sur le marché de l’UE ;

      Publier un rapport annuel visant à rendre compte du système de diligence raisonnée mis en place et des mesures prises pour assurer la conformité au règlement.

      La Commission européenne a établi une classification des pays de production selon leur niveau de risque de déforestation : les pays à haut risque, ceux à faible risque et ceux à risque standard. Les obligations de conformité varient en fonction du niveau de risque : par exemple, elles sont allégées pour les produits fabriqués dans les pays à faible risque.

      À quelles sanctions s’exposent les entreprises en cas de non-conformité ?

      En cas de non-respect, les entreprises risquent une amende équivalente à au moins 4 % de leur chiffre d’affaires dans l’UE, la confiscation des produits litigieux, l’interdiction d’exercer des activités commerciales dans l’UE et une politique de “name shaming” avec exclusion des appels d’offres.

      Comment les entreprises peuvent-elles s’adapter ?

      Pour se préparer au mieux au règlement en amont de son entrée en vigueur, les entreprises doivent suivre 4 étapes clés :

      • La définition du périmètre :
        • Identifier les produits et fournisseurs impactés par l'EUDR.
        • Déterminer les codes douaniers et les catégories de produits concernés.
        • Identifier la provenance des produits et analyser les flux logistiques et juridiques associés.
      • La préparation de la diligence raisonnée :
        • Mettre en place les processus et outils pour collecter et analyser les données relatives aux fournisseurs.
        • Élaborer des processus d'évaluation des risques pour les produits importés hors de l’UE et des processus intra-UE.
        • Élaborer une stratégie d’atténuation des risques.
      • La conduite de la diligence raisonnée :
        • Engager les fournisseurs et collecter les données nécessaires.
        • Évaluer les risques produits et fournisseurs et vérifier la cohérence des données.
        • Identifier les non-conformités et mettre en œuvre des actions correctives.
      • La déclaration :
        • Préparer et transmettre les déclarations de conformité au système d’information.
        • Consolider les informations pour le rapport annuel conformément aux exigences de l’EUDR.

      Retours d’expérience et bonnes pratiques

      « Notre expérience de la mise en œuvre de l’EUDR chez des clients de divers secteurs (retail, alimentation, luxe, automobile, cosmétiques, tourisme et hôtellerie, industries du bois, …) nous permet d’ores et déjà d’identifier différents écueils et bonnes pratiques. »
       
      Stéphane Baudé,
      Directeur Sustainability & ESG
      KPMG en France

      La bonne pratique à appliquer en priorité est l’anticipation :

      « Il s’agit de projets complexes amenant à réviser les pratiques et process de sourcing, d’achats et de logistique, et nécessitant le plus souvent un travail conséquent d’intégration de nouvelles briques technologiques dans les systèmes d’information. Une anticipation insuffisante entraînera nécessairement des processus dégradés ou manuels, alors qu’une anticipation plus complète permet de bénéficier pleinement des ressources d’automatisation grâce aux solutions technologiques disponibles. »
       
      Stéphane Baudé,
      Directeur Sustainability & ESG
      KPMG en France

      Il est également essentiel d’initier le dialogue avec les fournisseurs suffisamment en amont de la date d’entrée en vigueur de la réglementation.

      En matière de gouvernance, il est nécessaire que le projet EUDR de l’entreprise bénéficie d’un soutien à un haut niveau hiérarchique afin de pouvoir mobiliser efficacement et suffisamment tôt les différents contributeurs internes (supply chain, achats, juridique, IT, …).

      La cartographie des produits soumis au règlement, ainsi que des éléments déclencheurs des obligations réglementaires, est un exercice complexe mais fondamental.

      « Des erreurs dans cette cartographie peuvent perturber le bon déroulement du projet. Une surinterprétation des obligations réglementaires peut complexifier inutilement sa mise en œuvre, tandis qu’à l’inverse, différentes opportunités de simplification peuvent être saisies en matière d’organisation du sourcing ou des procédures douanières. »
       
      Stéphane Baudé,
      Directeur Sustainability & ESG
      KPMG en France

      Enfin, la mise en œuvre du règlement suppose d’établir :

      « une traçabilité des flux internes des produits concernés, depuis l’achat et les approvisionnements jusqu’à l’expédition aux clients, en passant par les éventuelles transformations. »
       
      Stéphane Baudé,
      Directeur Sustainability & ESG
      KPMG en France

      Cette exigence de traçabilité doit être prise en compte dès le début du projet de mise en œuvre de l’EUDR.

      Quelles sont les opportunités pour les entreprises ?

      La mise en conformité avec le règlement EUDR permet bien évidemment d’éviter les sanctions et litiges potentiels, mais elle offre également de réelles opportunités pour les entreprises dans :

      • La gestion des risques de la chaîne d’approvisionnement

        En identifiant, gérant et prévenant les risques liés aux droits humains, à la conformité réglementaire, à la réputation et aux questions environnementales.

      • La réduction des coûts

        En favorisant l’efficacité énergétique, la réduction des déchets et la sélection de fournisseurs et de produits durables.

      • L’amélioration de l’image de marque et de la réputation

        En tenant compte de l’intérêt grandissant des parties prenantes pour les enjeux environnementaux et sociaux.

      • L’accès à de nouveaux marchés

        En intégrant des critères de durabilité dans la politique d’achat pour répondre aux exigences de certains marchés.

      • Des relations plus durables et équilibrées avec les fournisseurs

        En facilitant et accompagnant le dialogue afin de créer une dynamique vertueuse.

      • L’amélioration de la démarche ESG

        En sélectionnant des fournisseurs qui respectent des normes sociales et environnementales élevées et en favorisant des produits et des processus plus durables.

      Auteur : 

      Photo de Stéphane Baudé
      Stéphane Baudé

      Directeur Sustainability & ESG

      KPMG en France

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