Même si le nouveau régime permettant aux organismes de bienfaisance canadiens de verser des subventions à des organismes sans vocation de bienfaisance peut paraître nouveau au Canada, le Royaume-Uni utilise un système similaire depuis un certain temps. Le système du Royaume-Uni peut contribuer à fournir des indications utiles aux organismes de bienfaisance canadiens qui souhaitent comprendre les lignes directrices de l’Agence du revenu du Canada (ARC).

Afin de comprendre le lien entre l’approche du Royaume-Uni et les règles canadiennes, il faut d’abord savoir que le droit canadien régissant les organismes de bienfaisance découle du système du Royaume-Uni et que le Canada a imposé ses propres règles principalement par l’intermédiaire de la Loi de l’impôt sur le revenu. Dans les deux pays, les administrateurs d’organismes de bienfaisance ont des obligations juridiques, notamment celles :

  1. De s’assurer que les biens de l’organisme de bienfaisance sont utilisés dans le but d’atteindre les objectifs de l’organisme de bienfaisance
  2. D’agir au mieux des intérêts de l’organisme de bienfaisance

Les directives du Royaume-Uni visent à assurer que les administrateurs respectent ces responsabilités générales, tandis que la version canadienne met l’accent sur les obligations prévues par la Loi de l’impôt sur le revenu.

Afin d’assurer l’utilisation appropriée des biens des organismes de bienfaisance, la Charities Commission propose que les fiduciaires analysent le risque qu’une subvention ne soit pas utilisée comme il est prévu. Ensuite, selon le niveau de risque, elle propose que les administrateurs prennent des mesures raisonnables afin d’« assurer raisonnablement » (reasonably ensure) que le risque est réduit au minimum. De plus, en ce qui concerne l’obligation d’agir au mieux des intérêts de l’organisme de bienfaisance, les directives suggèrent que les administrateurs prennent en compte l’ensemble des problèmes potentiels d’un organisme de bienfaisance, comme le risque d’atteinte à la réputation ou les risques juridiques, liés au financement dans un pays étranger.

En revanche, la Loi de l’impôt sur le revenu (Canada) exige qu’un organisme de bienfaisance « veille » – notons ici qu’il n’a pas à « veiller raisonnablement » – à ce que les fonds envoyés en tant que versement admissible (p. ex., une subvention) soient utilisés dans le but d’atteindre les objectifs de l’organisme de bienfaisance. Cela est extrêmement difficile à effectuer et exige, au moins en théorie, qu’il n’y ait aucun écart par rapport au respect absolu de la loi, sans aucune provision pour les circonstances imprévues. Comme il est impossible de contrôler tous les facteurs qui interagissent dans le développement d’un projet, il serait souhaitable que les tribunaux et l’ARC retiennent le mot « raisonnable » dans la disposition juridique.

D’ici là, la solution de l’ARC au problème des circonstances imprévues est d’exiger que l’organisme de bienfaisance entreprenne les étapes d’un contrôle diligent en ce qui concerne l’utilisation des fonds de la subvention. Le « niveau » de diligence requis est proportionnel au niveau de risque identifié lors de l’analyse. Théoriquement, on présume que les aspects qui, selon l’organisme de bienfaisance, posent un risque élevé exigent des protocoles plus rigoureux afin d’« assurer » que les fonds sont dépensés de façon appropriée. Bien que les directives ne mentionnent pas ce point, il serait excessif de faire preuve d’une diligence disproportionnée pour un aspect dont le risque est jugé nul; cela dit, il convient de prendre connaissance des commentaires sur la mise en application de ce point ci-après.

Lorsque l’organisme de bienfaisance détermine les mesures de contrôle diligent, ces mécanismes doivent être indiqués avec rigueur dans le document relatif à la subvention. En plus des exigences nécessaires au respect des règles de subvention, les organismes de bienfaisance devront inclure toute autre disposition nécessaire afin de protéger les biens et la réputation de l’organisme de bienfaisance. Il convient de noter que la Charities Commission du Royaume-Uni utilise le terme « contrôle diligent » (due diligence) comme synonyme du mot « assurance » (assurance). Essentiellement, l’organisme de bienfaisance doit être sûr que le bénéficiaire de la subvention utilise les fonds de façon appropriée et que ses biens et sa réputation ne sont pas exposés à d’autres risques.

Il est important de garder en tête que le système britannique met l’accent sur les responsabilités des administrateurs, parce que ce principe s’applique de manière équivalente aux administrateurs des organismes de bienfaisance canadiens. La question à laquelle il faut répondre est celle de savoir si le régime législatif au Canada impose aux administrateurs, en ce qui concerne la protection des biens des organismes de bienfaisance, des obligations plus importantes que celles prévues par la common law et que celles des directives du Royaume-Uni. Foncièrement, cette tâche qui revient aux administrateurs est de la plus haute importance et, même si le document britannique utilise le mot « raisonnable » (reasonable), les administrateurs des deux pays doivent faire tout ce qui est en leur pouvoir pour protéger les biens des organismes de bienfaisance, que cela soit indiqué dans les directives ou non.

Qu’en est-il alors des étapes indiquées dans les directives de l’ARC? Comme l’ARC détient un grand pouvoir discrétionnaire lorsqu’elle effectue une vérification, les directives peuvent donner un aperçu des cas où ce pouvoir pourrait être exercé. Afin d’éviter les répercussions défavorables sur les vérifications, les organismes de bienfaisance devraient être extrêmement prudents et s’assurer d’effectuer l’analyse et de préparer le dossier conformément aux attentes de l’ARC. De plus, en raison des responsabilités générales des fiduciaires, les administrateurs devraient considérer les directives de l’ARC comme étant les mesures minimales à prendre pour protéger les biens des organismes de bienfaisance et effectuer une analyse spécifique pour chaque subvention afin de procurer la meilleure protection qui soit aux ressources de l’organisme de bienfaisance.

Communiquez avec nous

Tenez-vous au courant de sujets qui vous intéressent.

Inscrivez-vous aujourd’hui pour avoir accès à du contenu personnalisé en fonction de vos intérêts.

Communiquez avec nous