La croissance de l’économie propre du Canada pourrait représenter la plus grande occasion économique de notre époque. Les investisseurs, les dirigeants d’entreprise et la prochaine génération de décideurs adoptent de plus en plus cet état d’esprit. Les sociétés qui réalisent ou accélèrent l’atteinte de leurs objectifs de décarbonation peuvent accéder à de nouveaux marchés et générer de nouveaux revenus. À l’inverse, celles qui traînent de la patte ou qui font obstacle à cette occasion courent un risque élevé d’érosion de la valeur.

Afin de prendre une longueur d’avance, les industries et les gouvernements mettent en place des mesures pour favoriser la transition vers l’énergie propre dans leurs économies locales. Les stratégies à ce chapitre comprennent des fonds ciblant de nouveaux produits et services, ainsi que d’importants incitatifs écologiques qui encouragent les entreprises à investir dans des technologies propres, comme la production d’hydrogène, le stockage d’énergie et la capture du carbone.

Toutefois, de nombreux enjeux économiques et technologiques mettent un frein à toute action liée à cette occasion manifeste.

« Bien faire la transition vers une économie propre exige des investissements massifs du public et du privé, surtout au Canada, où la performance économique est largement tributaire des ressources naturelles et de l’industrie lourde, explique Andrew McHardy, associé et leader national du Centre de décarbonation de KPMG au Canada. Ce que les critiques ne comprennent pas, c’est que les entreprises ne peuvent pas continuer à fonctionner comme elles le font aujourd’hui et s’attendre à enregistrer les mêmes bénéfices et la même croissance éternellement. »

M. McHardy souligne les profonds bouleversements qui secoueront l’environnement opérationnel d’ici les 25 prochaines années. Selon une étude réalisée en 2022 par l’Institute for Sustainable Finance, l’économie canadienne essuiera des pertes de 5,5 billions de dollars en dommages matériels d’ici la fin du 21e siècle si rien n’est fait pour contrer les changements climatiques.

« Les changements climatiques se répercutent sur l’économie par une baisse de la disponibilité des ressources, une hausse du prix des matières premières et l’augmentation des coûts d’exploitation dans les régions exposées aux intempéries ou aux catastrophes naturelles », ajoute M. McHardy.

Cette pression, les entreprises canadiennes la ressentent déjà au lendemain de la pire saison des feux de forêt de l’histoire du pays. Selon un récent sondage réalisé par KPMG, plus de la moitié des PME canadiennes disent avoir vu leurs coûts bondir au cours des 12 derniers mois en raison de phénomènes météorologiques violents. Soixante pour cent d’entre elles ont été directement touchées par de tels phénomènes et ont dû prendre des décisions difficiles comme interrompre leurs activités pour se préparer ou se relever.

L’innovation au cœur de la décarbonation

Si les changements climatiques constituent une forte incitation à l’action, d’autres considérations dictent la réaction des entreprises. En effet, leur rentabilité pourrait pâtir de l’adoption de nouvelles politiques et normes réglementaires, de même que de la demande croissante des consommateurs pour des produits et services à faible teneur en carbone.

Aux dires de M. McHardy, les entreprises doivent songer dès maintenant à adapter leurs modèles opérationnels à un environnement en pleine mutation et à planifier la décarbonation de leurs activités à grande échelle.

« Les entreprises peuvent commencer par recenser les pressions internes et externes qui pèseront le plus sur leurs activités », ajoute Rupert Crilly, associé, Services-conseils transactionnels et Centre de décarbonation chez KPMG au Canada.

« Les gros émetteurs ou utilisateurs de ressources devront porter une attention particulière à des facteurs externes comme la hausse de la tarification du carbone, un changement auquel ils seront davantage exposés, dit-il. En mesurant les répercussions de tels facteurs, les entreprises pourront déterminer les modifications stratégiques gagnantes à apporter. Il pourrait s’agir par exemple de repenser leur modèle d’affaires, de percer de nouveaux marchés, de redéfinir la priorité des services ou même de renoncer à des sources de revenus qui ne seront plus viables à l’avenir. »

Pour réaliser d’aussi gros changements, les entreprises doivent investir comme jamais dans l’innovation et en faire leur grande priorité.

« Les dirigeants semblent attendre l’arrivée de nouvelles solutions technologiques pour réaliser leurs objectifs de réduction des émissions », déplore M. McHardy.

M. McHardy craint que les dirigeants d’entreprise sous-estiment le degré d’innovation nécessaire pour bien intégrer et déployer ces technologies de pointe. La transformation qu’implique le processus de décarbonation est beaucoup plus profonde que ne l’imaginent plusieurs entreprises. Pour pouvoir tirer parti des occasions qui s’offrent à elles, les organisations doivent non seulement adapter leurs fonctions opérationnelles et leurs structures, systèmes et procédures internes, mais aussi mettre à profit les bonnes compétences et la bonne expertise.

« Et je ne parle pas seulement de compétences techniques, précise M. McHardy. Il faut revoir des fonctions comme la stratégie, la planification des immobilisations, la recherche et le développement ainsi que la gestion opérationnelle. Les entreprises doivent tenir compte des initiatives et des dépenses de décarbonation d’une très grande portée. »

De nombreux dirigeants reconnaissent l’importance d’intégrer la décarbonation dans la planification des immobilisations et la stratégie financière de leur organisation. Ce faisant, ils s’assureront de prioriser et de financer des initiatives qui contribuent à la réalisation de leurs objectifs de décarbonation tout en améliorant la transparence par l’intégration des facteurs environnementaux à leurs rapports financiers.

L’agilité comme antidote à l’incertitude

Les dirigeants d’entreprise qui investissent dans les facteurs ESG et la décarbonation ne reverront probablement pas la couleur de cet argent avant quelques années. D’ici là, M. Crilly leur recommande deux moyens d’action pour composer avec l’incertitude.

« Les dirigeants feraient bien d’envisager tous les scénarios possibles et de faire preuve d’ouverture pour être en mesure d’affronter ceux qui se produiront. »

Les entreprises doivent également adopter une approche agile.

« Voilà qui exige de bien se préparer, et notamment de définir les seuils d’intervention de l’organisation selon toutes sortes de scénarios. »

M. Crilly mentionne des développements comme le plafonnement de la tarification du carbone à un niveau prédéterminé, des incitations fiscales visant un certain type d’initiatives ou de nouveaux règlements imposant des exigences particulières. Lorsqu’il est temps d’agir, les organisations peuvent, selon lui, être opportunistes. En raison de son importance pour la rentabilité et les parties prenantes, la décarbonation est indéniablement devenue un nouvel impératif commercial.

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