Une nouvelle sûreté-propriété
La « cession de créance à titre de garantie » est enfin consacrée. Auparavant, la jurisprudence lui avait dénié toute autonomie et la requalifiait en nantissement de créance (Cass. com., 19 déc. 2006, n° 05-16.395 ; com., 26 mai 2010, n° 09-13.388), de sorte qu’une telle cession n’était possible que dans le cadre et les limites de la cession Dailly de créances professionnelles au profit d’une banque ou que dans celui d’une fiducie. Elle est aujourd’hui reconnue officiellement, et son intérêt majeur est de faire sortir la créance du patrimoine du cédant pour la faire entrer dans celui du cessionnaire et la mettre ainsi à l’abri des autres créanciers du cédant. Même si elle ne sera peut-être pas beaucoup utilisée dans les relations internes à côté du Dailly, du nantissement et de la fiducie-sûreté, elle sera très utile dans les opérations internationales.
Une conclusion et une opposabilité simplifiées et efficaces
La cession de créance à titre de garantie se coule dans le moule de la cession de créance pure et simple rénovée en 2016. Pour l’essentiel, il faut un acte écrit de cession, la créance garantie et la créance cédée devant y être désignées. La cession de créance future prend naissance rétroactivement au jour de l’acte, comme pour les créances actuelles, ce qui écarte toute incidence de l’ouverture d’une procédure collective entre-temps. Elle est parfaite entre les parties et opposable aux tiers par le seul effet et à la date de l’acte de cession, mais elle n’est opposable au débiteur que par une notification ou une prise d’acte de celui-ci. A compter de son opposabilité au débiteur, le cessionnaire bénéficie d’un droit de rétention sur la créance, c’est-à-dire d’un droit exclusif au paiement. Mais le cédant ne répond pas solidairement de la solvabilité du débiteur cédé, à la différence du cédant du Dailly.
Quelle sorte de créance peut être cédée : uniquement une créance de somme d’argent ou tout type de créance même non monétaire ? Le texte vise les créances, sans autre précision, ce qui pourrait inviter à une interprétation extensive, mais le régime est manifestement pensé pour les seules créances de somme d’argent.
Une réalisation organisée
Les sommes payées au cessionnaire au titre de la créance cédée doivent s’imputer sur la créance garantie si elle est échue ; si elle ne l’est pas, le cessionnaire est propriétaire des sommes reçues à titre de gage-espèces et peut en disposer librement, sauf clause contraire, un intérêt pouvant alors être prévu. En cas de clause contraire, les fruits et produits de la créance viennent accroître l’assiette de la garantie, là encore sauf clause contraire. Si le débiteur cédant fait défaut in fine, les sommes reçues du débiteur cédé peuvent être imputées sur la créance garantie, à charge d’en restituer le solde éventuel. Si au contraire il exécute son engagement, les sommes perçues doivent lui être restituées, avec un intérêt si celui-ci a été prévu conventionnellement.
DEJÀ PARUS
■ Présentation générale (28 septembre 2021)
■ L’application dans le temps de la réforme (30 septembre 2021)
■ Le cautionnement et la mention manuscrite (5 octobre 2021)
■ Le cautionnement commercial (8 octobre 2021)
■ Le sous-cautionnement (12 octobre 2021)
■ Principe de proportionnalité et devoir de mise en garde (14 octobre 2021)
■ L'information de la caution (19 octobre 2021)
■ Les gages : généralités (21 octobre 2021)
■ Les sûretés réelles pour autrui (26 octobre 2021)
■ Le nantissement général (28 octobre 2021)
■ Les nantissements spéciaux (2 novembre 2021)
■ Le nantissement de titres financiers (4 novembre 2021)
■ La cession de créance à titre de garantie (9 novembre 2021)
■ La cession de somme d'argent à titre de garantie (16 novembre 2021)
■ Les garanties sur le fonds de commerce (18 novembre 2021)
■ Privilèges, hypothèque et mesures diverses (23 novembre 2021)