Avec l’ordonnance « sûretés » du 15 septembre 2021, les « sûretés réelles pour autrui » font leur entrée officielle dans le Code civil. Traditionnellement appelées « cautionnements réels », elles trouvent une plus juste dénomination à cette occasion. Après des hésitations sur leur nature juridique (cautionnement ? sûreté réelle ? combinaison des deux ?), la Cour de cassation, par un arrêt de principe en Chambre mixte du 2 décembre 2005 (Cass. ch. Mixte, 2 déc. 2005, n° 03-18.210), avait conclu en faveur de leur nature exclusive de sûreté réelle et non de cautionnement. L’ordonnance du 15 septembre 2021 leur donne une visibilité légale en les consacrant expressément au rang de sûretés réelles à l’article 2325 et en rappelant la conséquence principale, qui leur confère leur nature fondamentale : le créancier n’a d’action que sur le bien donné en garantie.
Mais elle apporte une nuance de taille car les obligations d’information du créancier envers une caution sont étendues au constituant : le créancier professionnel doit au constituant personne physique une mise en garde contre un engagement inadapté du débiteur à ses capacités financières (C. civ., art. 2299), une information annuelle du montant de la dette restante (C. civ., art. 2302), une information ad hoc en cas de défaillance du débiteur (C. civ., art. 2303), toutes obligations que le garant doit également, par voie de conséquence, au sous-garant (C. civ., art. 2304). En outre, le tiers constituant dispose du bénéfice de discussion (C. civ., art. 2305 et 2305-1) et peut exercer un recours direct ou/et subrogatoire contre le débiteur pour lequel il a payé (C. civ., art. 2308 à 2312 et 2314). Et ces obligations s’appliqueront immédiatement aux cautionnements réels en cours au jour de l’entrée en vigueur de l’ordonnance, le 1er janvier prochain. Par ailleurs, là où la jurisprudence avait écarté le créancier titulaire d’une sûreté pour autrui à la fois des exigences de la procédure collective ouverte contre le garant, l’autre ordonnance du 15 septembre 2021, sur les procédures collectives, l’y soumet (nouvel article L. 622-25 du Code de commerce).
Les sûretés réelles pour autrui ne doivent pas être confondues avec les sûretés réelles constituées sur le bien d’autrui, dont la nullité est réaffirmée par l’ordonnance, qui précise cependant qu’elle ne peut être demandée que par le créancier qui ignorait que la chose n’appartenait pas au constituant (C. civ., art. 2335). Rappelons cependant que dans l’hypothèse d’un gage sur le bien d’autrui, la nullité sera paralysée par l’usucapion bénéficiant au créancier de bonne foi (C. civ., art. 2276), sauf à ce que celui-ci agisse lui-même en nullité.
DEJÀ PARUS
■ Présentation générale (28 septembre 2021)
■ L’application dans le temps de la réforme (30 septembre 2021)
■ Le cautionnement et la mention manuscrite (5 octobre 2021)
■ Le cautionnement commercial (8 octobre 2021)
■ Le sous-cautionnement (12 octobre 2021)
■ Principe de proportionnalité et devoir de mise en garde (14 octobre 2021)
■ L'information de la caution (19 octobre 2021)
■ Les gages : généralités (21 octobre 2021)
■ Les sûretés réelles pour autrui (26 octobre 2021)
■ Le nantissement général (28 octobre 2021)
■ Les nantissements spéciaux (2 novembre 2021)
■ Le nantissement de titres financiers (4 novembre 2021)
■ La cession de créance à titre de garantie (9 novembre 2021)
■ La cession de somme d'argent à titre de garantie (16 novembre 2021)
■ Les garanties sur le fonds de commerce (18 novembre 2021)
■ Privilèges, hypothèque et mesures diverses (23 novembre 2021)