Le contexte actuel des affaires est difficile. Le taux d’inflation annuel n’a jamais été aussi élevé en près de 40 ans au Canada.Partout dans le monde, les banques centrales augmentent les taux de façon agressive, les perturbations de la chaîne d’approvisionnement persistent, et la demande des consommateurs, qui était forte au moment où les mesures de la pandémie étaient les plus strictes, pourrait s’essouffler. Selon le dernier sondage Perspective des chefs de la direction de KPMG, la plupart des chefs de la direction canadiens (92 %) estiment qu’il y aura une récession au cours des 12 prochains mois.

Les forces géopolitiques et sociales entraînent aussi des répercussions sur les organisations. En raison du conflit en Ukraine, de nombreux pays d’Europe connaîtront peut-être des pénuries de gaz naturel l’hiver prochain, alors que la stabilité énergétique continue d’être un défi pour de nombreux pays. La concurrence dans le domaine du recrutement de la main‐d’œuvre qualifiée fait rage, et les travailleurs réclament des changements radicaux dans leur travail et sur le lieu de travail. Par ailleurs, les parties prenantes, dont les autorités de réglementation, ont de nouvelles exigences relativement à l’environnement, aux enjeux sociaux et à la gouvernance d’entreprise.

Même les grandes sociétés dotées d’une direction chevronnée peuvent éprouver des difficultés en pareille conjoncture parce que les facteurs macroéconomiques évoluent très rapidement par rapport à elles. En outre, bon nombre d’équipes de direction, de conseils d’administration et de comités d’audit n’ont jamais expérimenté en même temps une récession profonde, des taux d’inflation aussi élevés et des taux d’intérêt aussi hauts.

Compte tenu de l’essoufflement potentiel de la demande des consommateurs, il est peu probable que les sociétés sortent de cette récession à la sueur de leur front. Nous quittons une période de croissance des revenus pour entrer dans une période de maintien de la rentabilité. Les comités d’audit devront donc regarder au-delà du chiffre d’affaires et accorder une plus grande attention aux marges brutes, aux coûts et aux bénéfices.

Face à tant de défis, bon nombre d’équipes de direction et de conseils d’administration s’affairent à limiter les dégâts et à tenter d’apaiser toutes les parties prenantes. Ils doivent toutefois prendre du recul, sélectionner soigneusement les parties prenantes les plus importantes à satisfaire et formuler une stratégie pour passer à travers la situation actuelle, afin d’en sortir plus forts sur le long terme.

Alors que les organisations se préparent à une récession, il est important que les comités d’audit fassent évoluer les discussions vers ce qu’ils doivent entendre plutôt que vers ce que la direction pense qu’ils veulent entendre. Les comités d’audit devraient être catégoriques : leur chef des finances doit signaler toute préoccupation, et une approche « sans surprise » doit être adoptée à l’égard de l’exercice des activités.

Surveillez vos liquidités

Le tableau des flux de trésorerie est l’élément le plus important dans la situation actuelle. La direction et le conseil d’administration doivent surveiller de près les flux de trésorerie. Les discussions portant sur le BAIIA ajusté doivent être remplacées par des discussions sur la gestion de la trésorerie. Les flux de trésorerie sont le modèle le plus simple pour mesurer l’activité et constituent un indicateur des problèmes émergents. Une société peut avoir ou non des liquidités. Celles-ci ont une origine et une destination et peuvent indiquer que les passifs d’une organisation sont supérieurs à ses actifs. Dans les moments difficiles, la haute direction devrait les examiner fréquemment, si ce n’est chaque semaine.

La façon d’établir le tableau des flux de trésorerie est tout aussi importante que les flux de trésorerie eux-mêmes. Les comités d’audit doivent s’assurer que la direction applique une gouvernance, des contrôles et des processus appropriés en ce qui a trait à l’information sur les flux de trésorerie; qu’elle a une compréhension approfondie de ses modèles de prévision des flux de trésorerie; et que ses hypothèses et processus sont raisonnables.

Comprenez votre dette

Face à la hausse rapide des taux d’emprunt et à un potentiel ralentissement de l’économie, les organisations doivent s’assurer de bien comprendre la structure de leur dette et de leur capital. Certaines organisations sont déjà en train de réinitialiser leur dette en raison des conditions du marché. De plus, la direction devrait examiner les contrats d’emprunt et comprendre les clauses restrictives, y compris les majorations potentielles de taux, les obligations de déclaration et les éléments déclencheurs de manquements. Les entreprises dont les bilans sont sous-optimaux devraient envisager en priorité des options visant à les renforcer. Le comité d’audit devrait s’assurer que la direction comprend les dettes de la société et qu’elle a élaboré des scénarios raisonnables à l’égard de toute évolution.

Gardez les personnes adéquates

Lors de la pandémie, de nombreuses personnes, y compris des hauts dirigeants, ont réévalué leur carrière, leurs conditions de travail et leur équilibre travail-vie privée.De ce fait, certaines sociétés ont perdu des gestionnaires chevronnés. Les nouveaux dirigeants pourraient en outre ne pas avoir une aussi bonne connaissance des activités de la société. Ils rattrapent leur retard et pourraient ne pas cerner ou comprendre les tendances qui se produisent dans l’entreprise. Lorsqu’un chef des finances quitte son poste, le rôle du comité d’audit devient crucial parce qu’il a les connaissances de l’entreprise que le chef des finances possédait.

Le comité d’audit doit s’assurer que l’organisation dispose d’un programme d’incitation et de rétention adéquat pour garder ses meilleurs employés, et d’un plan de relève au cas où ceux-ci quitteraient leur poste. Une récession peut représenter une période de solitude pour la haute direction; les comités d’audit devraient donc également maintenir un niveau élevé de mobilisation.

Reposez-vous sur le comité d’audit

Le rôle du comité d’audit va maintenant au-delà de l’approbation des états financiers audités : il est le phare qui guide le conseil d’administration en ces temps difficiles. Les membres du comité d’audit sont habituellement plus axés sur les finances que leurs pairs au sein du conseil d’administration, et ils apportent des conseils éclairés en matière de gestion des liquidités, de structure de la dette et de structure du capital.

L’enjeu est considérable. Une résolution du conseil d’administration doit être signée si une société fait l’objet de certaines procédures officielles d’insolvabilité, exposant potentiellement les dirigeants et les administrateurs, ainsi que leurs décisions lors des périodes difficiles. Le comité d’audit pourrait avoir intérêt à repenser sa propre structure ainsi que ses propres processus et procédures, et à se demander s’il dispose des personnes appropriées en son sein, s’il dispose des ressources dont il a besoin et si sa composition actuelle lui permet d’affronter ces temps difficiles. Le comité d’audit ne devrait pas craindre de demander de l’aide s’il navigue en eaux inconnues.

Communiquez régulièrement

Dans ce contexte, les comités d’audit pourraient avoir de la difficulté à prendre du recul par rapport aux processus et à la communication d’informations, mais ils devraient s’efforcer d’adopter une approche plus proactive. Des réunions mensuelles, voire hebdomadaires, avec le chef des finances pourraient être nécessaires, plutôt que d’attendre la prochaine réunion trimestrielle.

Les comités d’audit devraient poser les questions de gestion difficiles de façon proactive afin d’obtenir des renseignements et de prendre les décisions de surveillance nécessaires. Par exemple, quelles sont leurs principales statistiques d’exploitation? Quels sont les principaux risques pour l’organisation? Ont-ils recours à des scénarios pour y faire face? Les procédures et les hypothèses utilisées pour les scénarios sont-elles raisonnables?

Les organisations devraient aussi mobiliser les principales parties prenantes. Par exemple, leur banque peut s’avérer un précieux conseiller et partenaire pour les aider à traverser les périodes difficiles. Bien souvent, les organisations attendent trop longtemps et doivent ensuite entamer le dialogue lorsque la crise survient.

Ne rien faire n’est pas une bonne stratégie

Une récession peut être une bonne occasion pour le conseil d’administration de déterminer une stratégie pour les deux ou trois prochaines années. Par exemple, si l’entreprise a ou peut constituer une réserve, le moment est peut-être bien choisi pour analyser ses acquisitions, car les évaluations s’ajustent à des cibles potentiellement en difficulté. Par ailleurs, si l’organisation n’est pas convaincue de pouvoir survivre à la récession, il pourrait être logique pour elle de vendre une partie ou la totalité de ces acquisitions.

La direction devrait chercher des moyens de tirer parti de cette situation. L’adaptation aux forces négatives du marché peut être un catalyseur pour devenir plus sobres. Elle doit donc dépasser sa peur de la situation et chercher à renforcer son bilan. Les difficultés économiques peuvent renforcer la discipline au sein d’une organisation, ce qui peut améliorer la rentabilité. Par exemple, les dépenses sont souvent remises en question à tous les niveaux, ce qui peut mener à des initiatives transformatrices de réduction des coûts.

C’est une période qui peut être difficile pour les organisations. En portant une attention particulière à leurs flux de trésorerie, en comprenant la structure de leur dette et de leur capital, et en travaillant à retenir les personnes appropriées, les sociétés peuvent s’en sortir indemnes, voire plus fortes. Le comité d’audit peut jouer un rôle clé en offrant son expertise financière et en s’assurant que la direction surveille les bonnes mesures de performance de l’entreprise au moyen de processus et de contrôles sains.

Questions que les comités d’audit devraient poser

  • Comprenons-nous nos outils de prévision des flux de trésorerie et nos principales statistiques d’exploitation?
  • Comprenons-nous la structure de notre dette à l’approche d’une récession?
  • Gérons-nous efficacement notre fonds de roulement et optimisons-nous nos liquidités?
  • Faisons-nous participer de manière proactive notre chef des finances, nos prêteurs et d’autres parties prenantes?
  • Comment gérons-nous les défis liés à cette situation tout en reconnaissant l’occasion de profiter des projets de transformation pour réduire les coûts ou d’effectuer des fusions et acquisitions afin de faire croître l’entreprise?

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