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Lors du Conseil ECOFIN du 14 mai 2024, les États membres de l'UE ne sont pas parvenus à un consensus politique sur l’ensemble du projet de directive ViDA (« VAT in the Digital Age »), du fait du désaccord de l’un d’entre eux sur l’application de la règle du « fournisseur présumé » aux plateformes de location d'hébergements de courte durée ou de services de transport de passagers (pilier 2). La présidence belge souhaite cependant obtenir, avant la fin de son mandat en juin, un accord sur le projet dans son ensemble et ne pas en séparer les différentes parties. Elle devrait donc tenter à nouveau de parvenir à un accord global lors de la prochaine réunion ECOFIN, le 21 juin 2024.

Le texte de compromis soumis au Conseil ECOFIN a néanmoins fait l’objet d’un consensus sur le pilier 1 (facturation électronique et e-reporting) et sur le pilier 3 (guichet unique). Après avoir présenté les apports concernant le pilier 1 (V. Facturation électronique et ViDA, 17 mai 2024), nous revenons ici sur les principales autres dispositions qui résultent de la dernière version du texte et leur calendrier prévisionnel d’application.

Il conviendra de surveiller ces mesures de manière précise car elles pourraient avoir un impact majeur sur le système TVA, concernant plusieurs enjeux cruciaux.

PLATEFORMES : EXTENSION DU MÉCANISME DE « FOURNISSEUR PRÉSUMÉ »

À compter du 1er juillet 2027 (au lieu du 1er janvier 2025), les plateformes qui facilitent, via une interface électronique, les services de transport de passagers par route ou la location d'hébergements de courte durée seraient considérées comme ayant reçu et vendu elles-mêmes ces services (« fournisseur présumé », redevable de la TVA), sauf si :

  • le prestataire sous-jacent a fourni son numéro d'identification à la TVA et déclaré qu'il facturera toute TVA due ;
  • sur option des États membres et à certaines conditions, le prestataire sous-jacent opère dans le cadre du nouveau régime particulier des petites entreprises.

Le dispositif de « fournisseur présumé » serait, on le rappelle, exclusif du régime spécial des agences de voyages.

La location d'hébergement de courte durée s’entendrait de la location ininterrompue d'un logement à la même personne pour un maximum de 30 nuits (au lieu de 45) non exonérée de TVA. Considéré comme similaire à une activité hôtelière, ce type de location serait soumis à des règles fixées par chaque État membre. Les États membres seraient tenus d'informer le Comité TVA de leur législation nationale relative à ces critères, conditions et limitations avant le 1er juillet 2027. La Commission européenne publierait ensuite, avant le 31 décembre 2027, une liste complète détaillant les critères, conditions et limitations fixés par chaque État.

C’est sur ce volet du projet que l'Estonie a opposé son veto, souhaitant que l’application du dispositif de « fournisseur présumé » aux plateformes d'hébergement et de transport soit optionnelle.

Par ailleurs, le texte initial du projet prévoyait d'étendre le mécanisme de « fournisseur présumé » à toutes les livraisons de biens intra-UE facilitées par une plateforme ou une place de marché (et plus seulement, comme actuellement, lorsque le fournisseur est établi hors UE et le client est non-assujetti (B2C)).

Dans la dernière version du texte, ce mécanisme resterait limité aux livraisons provenant de fournisseurs hors UE mais serait étendu, à compter du 1er janvier 2026, aux ventes à des assujettis (B2B).

Au plus tard le 1er juillet 2027, la Commission présenterait un rapport d'évaluation sur le fonctionnement du dispositif et, le cas échéant, une proposition législative en vue de son extension.

ÉLARGISSEMENT DU GUICHET UNIQUE

Prévue pour soutenir l'objectif, à terme, d'un enregistrement à la TVA unique dans l'UE, l’extension du guichet unique de l’UE (OSS-UE) interviendrait au 1er juillet 2027 (au lieu du 1er janvier 2025), avec toutefois une entrée en vigueur anticipée au 1er janvier 2026 pour les fournitures de gaz, électricité et chauffage/refroidissement par des opérateurs non établis dans l’UE à des non-assujettis (B2C).

On rappelle que l'OSS serait notamment étendu aux :

  • transferts de biens propres (le régime des stocks en consignation serait progressivement supprimé sur une période de 12 mois) ;
  • ventes de biens B2C avec installation ou assemblage ;
  • ventes domestiques de biens B2C par des assujettis non établis dans l'État membre de consommation ;
  • ventes de biens à bord de navires, avions ou trains ;
  • ventes de gaz, électricité, chauffage/refroidissement par des assujettis non établis dans l'État membre de consommation.

Corrélativement, à compter du 1er juillet 2027 également, le mécanisme d’autoliquidation serait généralisé : lorsqu’une livraison de biens ou une prestation de services est effectuée par un assujetti qui n'est ni établi ni identifié à la TVA dans l'État membre où la TVA est due, le redevable de la taxe serait le destinataire de la livraison ou de la prestation s’il est déjà identifié à la TVA dans cet État.

Les États membres pourraient en outre prévoir l’application de l'autoliquidation même si le destinataire n’est pas déjà identifié à la TVA dans l'État membre où la taxe est due.

BIENS D’OCCASION ET ŒUVRES D’ART

Le texte initial du projet prévoyait d’étendre le régime des ventes à distance aux ventes de biens d’occasion ou d’œuvres d’art, d’antiquité et de collection, soumises au régime de la marge. Ces ventes auraient ainsi été soumises à la TVA dans l'État membre de destination et non plus dans l’État membre de départ.

Cette disposition ne figure plus dans le texte de compromis.



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