Introduction
Le 23 octobre 2024, la commissaire à l’équité salariale (« CES ») a rendu sa décision dans l’affaire Alliance de la Fonction publique du Canada (AFPC) c. Banque du Canada.1 Cette affaire a confirmé que l’agent négociateur de l’unité de négociation des employés syndiqués d’un employeur a le pouvoir absolu, en vertu de la Loi sur l’équité salariale, L.C. 2018, ch. 27, art. 416 (la « Loi »), de choisir le nombre de représentants au sein du comité d’équité salariale de l’employeur. De plus, la décision fournit aux employeurs des indications utiles sur ce qui peut ou ne peut pas constituer un comportement de mauvaise foi, arbitraire ou discriminatoire au sens du paragraphe 150(3) de la Loi.
Contexte factuel
Le 16 octobre 2023, l’Alliance de la Fonction publique du Canada (« AFPC ») a déposé une plainte en vertu du paragraphe 150(3) de la Loi, alléguant que la Banque du Canada (la « Banque ») avait agi de mauvaise foi en prenant la décision de limiter l’AFPC à un membre titulaire et à un membre suppléant au sein de son comité d’équité salariale. Bien que la Loi exige de la Banque qu’elle facilite la création d’un comité d’équité salariale qui respecte les exigences de la Loi, l’AFPC a soutenu que, en tant qu’unité de négociation des agents de sécurité et des professionnels de l’informatique, elle avait le pouvoir exclusif et l’entière discrétion de choisir le nombre de représentants qui représenteraient les membres de son unité de négociation au sein du comité d’équité salariale. La Banque n’était pas d’accord et a soutenu que si un agent négociateur pouvait choisir le nombre de représentants de son choix, les comités d’équité salariale pourraient atteindre une taille telle qu’ils deviendraient non fonctionnels.
La Loi
En vertu du paragraphe 16(1) de la Loi, les employeurs comptant 100 employés ou plus, ou 10 à 99 employés si certains ou tous étaient syndiqués à la date à laquelle l’employeur est devenu assujetti à la Loi, sont tenus de faire tous les efforts raisonnables pour mettre en place un comité d’équité salariale afin de mener à bien l’exercice d’équité salariale.
En outre, les exigences relatives à la composition du comité sont énoncées au paragraphe 19(1) de la Loi, comme suit :
19(1) Le comité d’équité salariale est composé d’au moins trois membres. Les règles ci-après s’appliquent à sa composition :
a) au moins les deux tiers des membres représentent les employés visés par le plan
b) au moins 50 % des membres sont des femmes
c) au moins un membre, choisi par l’employeur, représente celui-ci
d) s’agissant des employés syndiqués visés par le plan, il y a autant de membres représentant les employés syndiqués qu’il y a d’agents négociateurs, et chaque agent négociateur choisit au moins un membre pour représenter les employés syndiqués faisant partie de toute unité de négociation représentée par l’agent négociateur
e) s’agissant des employés non syndiqués visés par le plan, au moins un des membres, choisi par eux, les représente.
Décision
Qui décide du nombre maximum de représentants au sein d’un comité d’équité salariale?
En l’absence de cette intention claire et compte tenu des nombreuses utilisations de l’expression « au moins un » dans la Loi, la CES conclut « qu’il n’y a pas de nombre maximal de membres du comité prévu par la loi ni de limite au nombre de membres qui peuvent être choisis par un agent négociateur pour faire partie du comité ».2 Par conséquent, la CES a statué que la Banque n’avait pas le pouvoir de déterminer le nombre de membres que l’AFPC peut choisir pour représenter chacune de ses unités de négociation au sein du comité d’équité salariale.
La CES a ajouté qu’il existait plusieurs mécanismes en vertu de la Loi pour répondre aux préoccupations de l’employeur au sujet de la non-fonctionnalité d’un comité d’équité salariale. Par exemple, si les membres du comité qui représentent les employés ne parviennent pas à se mettre d’accord à l’unanimité sur une question, c’est la position de l’employeur qui l’emporte en vertu du paragraphe 20(1) de la Loi. De plus, si les représentants des employés (y compris les membres de l’agent négociateur) et de l’employeur au sein d’un comité se trouvent dans une impasse concernant une étape de l’exercice d’équité salariale, des mécanismes de règlement des différends sont en place pour garantir que l’exercice d’équité salariale puisse être mené à son terme. Enfin, il existe d’autres options, telles que la demande d’une composition différente du comité ou de l’absence totale de comité.
Qu’est-ce qui constitue un acte de mauvaise foi, arbitraire ou discriminatoire au sens du paragraphe 150(3)?
La CES a reconnu que la Loi ne définissait pas les termes « mauvaise foi », « arbitraire » ou « discriminatoire », et qu’il n’existait aucune jurisprudence qui interprète ces termes dans le contexte de la Loi. En s’inspirant des définitions des dictionnaires et des interprétations des tribunaux des lois provinciales sur l’équité salariale, la CES a déterminé ce qui suit :
- agir de « mauvaise foi » doit inclure un élément de mauvaise volonté ou une intention d’induire en erreur ou de tromper3
- le terme « arbitraire » peut être compris comme incluant des actions qui sont capricieuses, plutôt que fondées sur la raison ou le jugement4
- ce qui constitue une action « discriminatoire » sera déterminé à l’aide d’une approche large et ciblée, semblable à celle adoptée dans le contexte du travail et des droits de la personne.5
La CES a déterminé que l’AFPC n’a pas réussi à démontrer que la Banque a agi de mauvaise foi ou d’une manière arbitraire ou discriminatoire.La Banque n’avait pas l’intention d’induire en erreur l’AFPC, et la CES a conclu que les décisions de la Banque de fixer un nombre maximum de membres pour le comité étaient motivées et fondées sur sa compréhension à l’époque des droits et obligations que lui conférait la Loi.6
Principaux points à retenir
Pour les employeurs sous réglementation fédérale, cette décision précise ce qui suit :
- Il incombe à l’employeur de mettre en place le comité d’équité salariale et de faciliter son travail, mais cette responsabilité ne s’étend pas à la fixation unilatérale d’un nombre maximum de membres du comité, que ce soit sur la base de la proportionnalité ou pour d’autres raisons
- Les agents négociateurs ont le pouvoir exclusif de mener à bien le processus de sélection et de déterminer le nombre de représentants qui représenteront les membres de leur unité de négociation au sein du comité d’équité salariale
- Bien que l’on puisse craindre que les comités d’équité salariale atteignent une taille ingérable, les mécanismes prévus dans la Loi elle-même offrent une protection contre les retards et les obstructions déraisonnables
- Pour se prémunir contre les allégations de conduite de mauvaise foi, arbitraire ou discriminatoire, toutes les décisions de l’employeur relatives à la Loi devraient être prises par écrit et étayées par des motifs clairs.
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