Il y a fort longtemps… en 2023, nous avons participé à un atelier avec des fournisseurs du secteur des services à la personne et des services sociaux. Nous devions analyser la philosophie de la prestation de services dans le secteur et déterminer de quelle façon ce dernier pouvait faire une plus grande différence pour les Canadiens et Canadiennes. De nombreuses idées sur une panoplie de sujets ont émergé, mais quand est venu le temps de définir le terme « inclusion », il y a indéniablement eu une pause. Nous comprenions bien le concept et son importance, mais nous trouvions épineux de donner des exemples ou une définition utile — a fortiori universelle — qui pouvait s’appliquer à un domaine aussi vaste que les services publics.
Ce fut un moment inoubliable. Il semble assez clair que l’inclusion dans les services sociaux comprend des programmes et des lieux où tout le monde — y compris le personnel — se sent bienvenu, en sécurité et habilité. Il semble aussi clair qu’un milieu inclusif ne se limite pas à la présence d’une enseigne de bienvenue sur la porte ni à l’application de solutions générales. Il s’agit de s’assurer que les services publics offerts au Canada interpellent les personnes auxquelles ils sont destinés et qu’ils ont un lien avec elles.
Si vous êtes comme nous, vous réalisez que cette description n’est pas satisfaisante. En d’autres termes, la question est difficile.
Deuxièmes chances
Pour nos prochains articles, nous reviendrons sur cette séance de réflexion (du moins, à son esprit) et nous pencherons de nouveau sur la question. Dans le présent article, nous commencerons par nous demander ce que signifie l’inclusion dans un contexte de prestation de services publics, et tout particulièrement des services destinés aux Canadiens et Canadiennes sans domicile. Mais quelle signification cela a-t-il pour une mère monoparentale qui dépend de ces services? Une personne ayant des défis de santé mentale ou physique? Un membre de la communauté autochtone? Ou une personne de la communauté 2SLGBTQIA+?
Vous comprenez le dilemme.
Le Canada regroupe des personnes de milieux et de conditions diversifiés. Alors, comment le secteur public peut-il inclure toutes les personnes qui font appel aux programmes de soutien et d’aide aux sans-abris tout en faisant face à de sérieuses contraintes financières et humaines, pour ne nommer que celles-là?
Il faudrait peut-être commencer par comprendre qui doivent viser les services inclusifs à la population itinérante du Canada. Selon de récentes statistiques, chaque nuit, plus de 35 000 Canadiens et Canadiennes doivent dormir à la belle étoile, et il y aurait entre 150 000 et 300 000 sans-abris au total au Canada. Ces données sont importantes, mais qui se cache derrière ces chiffres?
Combien y a-t-il d’hommes, de femmes, de membres de minorités visibles ou de personnes ayant besoin de soutien mental ou physique supplémentaire? Quand une femme cherche un refuge pour échapper à une situation de violence familiale, reçoit-elle les services dont elle a besoin à ce moment-là? Y a-t-il des ressources et des professionnels sur place pour aider les personnes avec des problèmes de dépendance? Et celles d’origines culturelles différentes reçoivent-elles un soutien qui respecte leur foi?
Encore une fois, l’inclusion peut prendre une forme différente pour chaque refuge pour sans-abris ou fournisseur de services selon la région, la communauté et d’autres facteurs. Voilà pourquoi, au départ, la promotion de l’inclusion dans ce secteur pourrait exiger plus de solutions personnalisées qui reposent sur un cadre que les praticiens et praticiennes du secteur public pourraient utiliser pour répondre aux questions suivantes : « Quelle est ma clientèle et y a-t-il une façon de s’assurer qu’elle se sente bienvenue, respectée et en à l’aise de recevoir de l’aide? »
Si les statistiques suggèrent qu’un certain nombre de personnes ne parlent pas l’anglais ou le français, il serait sensé d’avoir du personnel interprète ou une technologie qui facilite les communications dans plusieurs langues. De même, si certains clients d’un centre de services donné sont malentendants, ce centre serait avisé d’avoir un interprète en langue des signes américaine ou québécoise au sein de son personnel. Nous pouvons avoir les mêmes considérations pour les personnes en fauteuils roulants, celles qui ont des restrictions alimentaires, celles qui respectent des pratiques culturelles strictes, etc.
La différence compte
Nous voyons déjà venir la réplique : il est tout simplement trop complexe et trop coûteux de voir à ce que chaque programme et lieu conçu pour venir en aide aux sans-abris dispose du personnel requis et soit prêt à répondre aux besoins de chaque personne qui fait appel à ses services. Et nous en convenons. Respecter les besoins de la personne tout en offrant des services essentiels à d’importantes communautés est un exercice d’équilibrisme exécuté par chaque service public.
Pour cette raison, nous devons nous pencher sur cette complexité pour déterminer ce que signifie l’inclusion pour chaque praticien. La réponse dépendra de la communauté, du profil démographique et des données. Quand elle sera établie, elle pourra servir de point de repère pour la conception et l’élaboration de programmes.
Toutefois, nous devons aussi faire attention de ne pas caser les gens dans des catégories trop restrictives. Nous portons tous plusieurs chapeaux. Par conséquent, l’inclusion dans la prestation des services publics consiste à comprendre les différences qui comptent le plus quand on offre du soutien et à fournir un service où tout le monde a une chance équitable.
Tourner les coins ronds
Il n’y a pas d’approche universelle pour appliquer l’inclusion, mais nous devons continuer de nous demander comment nous pouvons fournir des lieux et des services plus inclusifs aux Canadiens et Canadiennes qui demandent de l’aide. Ce faisant, nous ferons bon usage de nos ressources du secteur public et nous assurerons que les services publics ont le plus grand effet possible sur les populations ciblées. Ne manquez pas de nous lire au cours des prochaines semaines!Nous aborderons la même question pour d’autres dimensions des services sociaux.