• Sonya Gulati, Author |
5 minutes de lecture

Tout au long de mon enfance, mes parents enseignants m’ont inculqué la conviction que l’éducation et la littératie sont des forces essentielles du progrès. Pourquoi? Parce qu’elles servent d’assise à l’autonomisation socioéconomique; elles outillent chaque personne, ainsi que la société dans son ensemble. Elles sont un trésor de sagesse inestimable pour toute société libre, équitable et prospère.

Aujourd’hui, quand je parle du pouvoir de la littératie dans le cadre de mon travail au sein du secteur public, j’entends plus que la lecture et l’écriture. Je fais plutôt référence à la capacité de parler et de communiquer, ainsi qu’à la compréhension des concepts mathématiques fondamentaux et des technologies que l’on utilise tous les jours, celles-ci évoluant si souvent et si rapidement qu’elles affectent notre disposition à acquérir d’autres compétences. En outre, ces dernières ne s’acquièrent pas de façon isolée : les gouvernements doivent adopter une approche axée sur l’humain, de manière à assurer à tous un accès à l’éducation et aux ressources nécessaires pour exploiter le pouvoir de la littératie.

Et ce pouvoir s’accompagne d’un potentiel incalculable.La littératie est la porte d’entrée vers une bonne éducation, un emploi convenable et la capacité d’être un membre plus actif de la communauté. À l’échelle nationale, un taux d’alphabétisation élevé se traduit par des résultats sociaux et économiques solides qui stimulent la productivité et la croissance du produit intérieur brut (PIB), en plus de favoriser une concurrence viable au sein des marchés mondiaux de plus en plus compétitifs. Je suis optimiste lorsque je tombe sur des recherches qui démontrent que même une augmentation de 1 % des compétences en littératie d’une main‐d’œuvre peut, au fil du temps, contribuer à faire augmenter le PIB de 3 % chaque année et à accroître le rendement de 5 %1.

Sauts de page
Il est difficile de sous-estimer le rôle de la littératie dans la vie des personnes, des communautés et des populations. Je doute aussi que quiconque remette en question les avantages à long terme de privilégier la littératie sous toutes ses formes. Toutefois, malheureusement, certains pays ont du mal à favoriser et à maintenir un taux d’alphabétisation élevé.

Le Canada fait partie de ces pays. En dépit de nos ressources et de notre vaste système d’éducation, Statistique Canada a révélé qu’un Canadien sur six ne peut réussir un test d’alphabétisation de base, et qu’environ la moitié de notre main-d’œuvre échouerait une évaluation de niveau secondaire. Par conséquent, la moyenne canadienne en matière d’alphabétisme des adultes canadiens est inférieure à celle de pays membres de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), comme le Japon, la Suède et l’Australie.

Nous pouvons deviner les raisons pour lesquelles les taux d’alphabétisation sont en baisse et les répercussions de cet état de fait sur diverses populations. Je suis persuadée, par exemple, qu’au cours des dernières années, la pandémie a joué un rôle important en perturbant l’apprentissage à temps plein et en personne pour les étudiants. Les enfants et les jeunes adultes ont manqué des années cruciales dans leur processus d’apprentissage, sans parler de l’accès à des expériences sociales importantes et à des occasions d’apprentissage en groupe qui sont essentielles à ce processus. Les classes virtuelles ont comblé l’écart d’une certaine façon, mais même les programmes d’apprentissage à distance les plus interactifs et les plus attrayants n’ont pas réussi à reproduire la valeur d’être dans une classe.

Je pense aussi aux nouveaux arrivants, qui peuvent faire face à de nombreuses difficultés en matière d’accès à l’éducation de base et aux compétences dont ils ont besoin pour entamer leur nouvelle vie au Canada.Certes, il existe des programmes pour les aider à acquérir des compétences en lecture et en écriture, mais je me demande parfois s’il y en a suffisamment pour répondre à la demande, étant donné que de plus en plus d’immigrants et de réfugiés traversent nos frontières à la recherche d’une vie meilleure. Plus il leur faut du temps pour s’intégrer à leur nouvelle communauté, plus il leur sera difficile d’établir des liens, d’entrer sur le marché du travail et de trouver un logement où s’installer.

On peut en dire beaucoup sur les raisons pour lesquelles les lacunes et les obstacles en matière de littératie méritent un intérêt renouvelé. Voyons maintenant ce que nous pouvons faire pour changer le cours des choses. J’aimerais pouvoir dire qu’il existe une solution simple, mais comme mes pairs de l’éducation publique et des communautés académiques peuvent l’attester, il n’y a pas de réponse universelle.

Tout d’abord, l’augmentation du taux d’alphabétisation commence par une compréhension plus approfondie de qui cela touche et des obstacles qui se dressent sur le chemin de ces personnes. Avec de meilleures données et recherches, nous pourrons démêler les facteurs contributifs, qu’il s’agisse des niveaux de revenu, de l’environnement de vie, des modèles d’éducation ou du milieu familial, entre autres. Une fois que nous aurons une meilleure idée des obstacles sous-jacents, nous serons peut-être en mesure d’adapter nos ressources et nos stratégies de soutien en conséquence.

En outre, peut-être qu’une partie de la solution est de fournir plus d’aide financière. Un grand nombre de ménages bénéficieraient de programmes supplémentaires de tutorat ou d’éducation. Je reconnais que l’argent n’est jamais la réponse complète à un problème social, mais cela peut tout de même contribuer à résoudre au moins une petite partie du casse-tête de l’alphabétisation. Le fait que les investissements canadiens dans l’éducation n’aient pas suivi le même rythme que ceux des pays de l’OCDE ne fait que souligner le potentiel de cette idée.

Enfin, il convient de rappeler que les taux d’alphabétisation et de numératie bénéficient d’une gouvernance centrée sur l’être humain, c’est-à-dire que les gouvernements devraient accordent la priorité à l’avancement, à la promotion et à la préservation des compétences humaines requises pour mener une vie saine et épanouissante.

Yeux grands ouverts
Je ne prétendrais jamais savoir exactement ce qu’il faut pour aider le système de l’éducation à faire croître le taux d’alphabétisation. Cependant, ce que j’ai appris dans le cadre de mon expérience en tant qu’économiste, de fonctionnaire et de défenseure du secteur public, c’est que rien ne remplace la littératie lorsqu’il est question d’offrir aux Canadiens de tous âges et de toutes origines la capacité de s’épanouir et de prospérer. Et après tout, comme l’a dit Plutarque, « L’esprit n’est pas comme un vase qui a besoin d’être rempli; c’est plutôt une substance qu’il s’agit seulement d’échauffer ».

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