• Lisa Cabel, Author |
5 minutes de lecture

Ce billet a été rédigé en collaboration avec Maciej Lipinski, qui a depuis quitté KPMG au Canada.

​Comme les vacances d’été approchent et le mercure est à la hausse, nous voulons prendre le temps de réfléchir aux conseillers scolaires. Nous diviserons cette réflexion en deux billets distincts. Le présent billet fait le point sur une ordonnance récente d’une cour de l’Ontario traitant des rôles et responsabilités des conseillers scolaires. Le prochain, qui sera publié plus tard ce mois-ci, offrira des conseils sur la liberté d’accès aux documents et aux communications que conservent les conseillers scolaires. Nous espérons que les deux seront opportuns et pertinents, surtout étant donné le fait que les communautés interagissent maintenant activement de différentes façons avec leurs conseils d’écoles.

Tout commence par la confiance
En règle générale, l’enseignement public alimente les démocraties saines en outillant ses élèves pour qu’ils deviennent des citoyens engagés, mais qu’en est-il de la démocratie à même les écoles publiques?

En Ontario, en vertu de la Loi sur l’éducation, les conseils d’administration et les conseillers scolaires font le pont entre les conseils d’écoles et les communautés qu’ils desservent. Plus précisément :

  1. On confie aux conseillers scolaires la tâche de rapporter les inquiétudes des parents, des élèves et des alliés du conseil d’écoles aux autres membres de leur conseil d’administration.
  2. Toutefois, ce dernier doit prendre des décisions en tant qu’entité unique pour soulager ces inquiétudes, habituellement lors de réunions tenues en public et durant lesquelles les décisions sont prises au moyen d’un vote majoritaire.
  3. Lorsque le conseil d’administration prend une décision, il incombe à chacun de ses conseillers scolaires de la faire respecter.
  4. En effectuant ce qui précède, un conseil d’administration et ses conseillers scolaires doivent faire respecter les politiques et procédures établies dans les règlements et le code de conduite du conseil d’écoles.

Au cours des dernières années, les conseils d’administration des conseils d’écoles publiques de l’Ontario ont fait face à des défis, à de l’opposition et même parfois à de vives exigences de changement et de responsabilisation de la part des membres de leurs communautés. Les points litigieux soulevés (article en anglais) lors des assemblées publiques de conseils d’administration concernent notamment les politiques de port obligatoire du masque, les mesures de protection contre la discrimination des élèves transgenres et les mesures contre le racisme envers les Noirs. En arrière-plan, les écoles aux États-Unis ont remarqué une tendance à la hausse (article en anglais) des contestations du public à leurs politiques, dont certaines ont attiré l’attention de tout le pays à travers les médias sociaux et d’autres canaux de diffusion.

Alors que les conseils d’écoles et leurs conseillers scolaires sont de plus en plus sous la loupe du public, une ordonnance récente de la Cour divisionnaire de l’Ontario contribue à clarifier les rôles des conseillers scolaires de la province.

L’ordonnance récente d’une Cour de l’Ontario
Récemment, la Cour divisionnaire de l’Ontario a rejeté une demande visant à infirmer la décision d’un conseil d’administration selon laquelle un de ses membres avait enfreint le code de conduite du conseil d’écoles. Le conseil d’administration avait pris cette décision contestée en réponse à des commentaires publics d’un de ses membres, lequel dénigrait le fait que le conseil d’écoles reconnaît les motifs d’identité sexuelle et d’expression de l’identité sexuelle protégés par le Code des droits de la personne.

À la suite d’une enquête, un premier vote du conseil d’administration est arrivé à une voix en dessous de la supermajorité des deux tiers requise pour juger que le conseiller scolaire avait enfreint le code de conduite du conseil d’écoles. Par contre, une réponse fortement négative de la part de la communauté a incité le conseil d’administration à réévaluer sa décision initiale. Lors de cette réévaluation, le vote a atteint le seuil requis, et il a été reconnu que le conseiller scolaire avait enfreint le code de conduite du conseil d’écoles.

La Cour divisionnaire a maintenu la décision de réévaluation du conseil d’administration ainsi que ses décisions subséquentes de reconnaître une violation du code de conduite ainsi que d’imposer et de confirmer des sanctions contre le conseiller scolaire en défaut.

L’ordonnance de la Cour a reconnu que la Loi sur l’éducation donne aux conseils d’écoles la capacité de gouverner leurs propres procédures. Cela signifie que le conseil d’écoles en question a pu (1) établir des règles exigeant un vote à supermajorité pour d’abord juger d’une violation du code de conduite de la part d’un conseiller scolaire et (2) établir des règles concernant la réévaluation de décisions particulières. Notamment, si le conseil d’écoles avait choisi d’exiger uniquement un vote à majorité pour juger d’une violation du code de conduite, le premier vote aurait suffi pour juger que ce conseiller scolaire avait enfreint le code.

Les conseillers scolaires sont avant tout responsables
Dans certains passages de son ordonnance, la Cour a rappelé que les conseillers scolaires doivent équilibrer leurs propres opinions et l’intérêt public général qu’ils servent. Comme l’a indiqué la Cour (traduction libre) :

L’objectif de la Loi sur l’éducation est donc l’enseignement public ainsi que le bien-être et la réussite des élèves qui y participent, dans le but de veiller à ce qu’ils deviennent des citoyens attentionnés et actifs. C’est le conseil, et par le fait même ses conseillers scolaires, qui est au service de ces objectifs et non l’enseignement public qui est au service des objectifs d’un conseiller scolaire. […]

Comme mentionné ci-dessus, le conseil est dans l’obligation de promouvoir le bien-être des élèves ainsi qu’un climat positif et inclusif à l’école. Il a également l’obligation d’imposer une norme de conduite minimale à ses conseillers scolaires. Tous les conseillers scolaires se voient obligés de se conformer au code de conduite et d’aider le conseil à exercer ses fonctions. La sanction imposée au requérant à la suite de ses commentaires irrespectueux n’allait pas à l’encontre de la Loi sur l’éducation; elle était plutôt conforme à ses objectifs législatifs.

En d’autres mots, le rôle d’un conseiller scolaire en Ontario est fondamentalement d’être responsable de l’administration de l’enseignement public. Cela signifie que les conseillers scolaires ne peuvent pas laisser leurs opinions influer sur les objectifs établis dans la Loi sur l’éducation.

Points à retenir pour les conseillers scolaires et les membres des communautés
L’ordonnance de la Cour indique que les conseillers scolaires de l’Ontario doivent être régis par un intérêt public général qui a préséance sur tout intérêt personnel ou tout intérêt d’un groupe d’alliés ou de citoyens. De ce point de vue, l’ordonnance peut être considérée comme un guide, autant pour les conseillers scolaires que pour les membres des communautés, stipulant que les conseillers scolaires sont avant tout des fonctionnaires et non des porte-parole et que leur rôle comprend la prise en considération et l’équilibre des nombreuses opinions dans leurs communautés plutôt que la mise en valeur et la défense des opinions de certains membres au détriment des autres.

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