• Lisa Cabel, Author |
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Ce billet a été rédigé en collaboration avec Maciej Lipinski, qui a depuis quitté KPMG au Canada.

​C’est aujourd’hui la cinquième Journée internationale de l’éducation, dont le thème, cette année, est « investir dans l’humain, faire de l’éducation une priorité ». Le 22 février, ce sera la Journée du chandail rose, une occasion annuelle pour les organisations de réfléchir à l’intimidation et de la combattre. Les valeurs inhérentes à ces journées de réflexion et de sensibilisation sont étroitement liées : dans les écoles du pays, l’intimidation entrave la capacité des enseignants d’enseigner et celle des étudiants d’apprendre; il s’agit donc d’une difficulté à surmonter en permanence.

Une étude récente a révélé que pendant la pandémie de COVID-19, les cas d’intimidation physique, verbale et sociale déclarés par des étudiants avaient nettement diminué, mais pas la cyberintimidation. Il s’agit d’un effet secondaire positif de la réduction des risques d’occurrence de ces formes d’intimidation, puisque les étudiants suivaient un apprentissage en ligne ou hybride et avaient moins d’interactions en personne. Maintenant, avec le retour généralisé à l’apprentissage en classe, les écoles et les étudiants risquent de voir la prévalence de l’intimidation sous toutes ses formes augmenter de nouveau et nuire aux efforts de prévention et d’intervention. En Ontario, par exemple, en vertu de la Loi sur l’éducation, les écoles et conseils scolaires sont juridiquement tenus de prendre activement des mesures anti-intimidation et d’établir un plan de prévention et d’intervention en matière d’intimidation.

Pour les étudiants, les politiques et les pratiques anti-intimidation des écoles peuvent avoir une incidence positive durable sur les résultats scolaires, sur la confiance en soi et même sur la santé émotive et mentale à l’âge adulte. Pour les écoles, le problème est d’autant plus difficile que l’intimidation est complexe et qu’elle survient dans un contexte social et culturel élargi qui évolue avec le temps. Selon la Note 144 de la politique ontarienne :

L’intimidation se produit dans des situations où il y a un déséquilibre de pouvoirs, réel ou perçu, entre des personnes ou des groupes, et peut être un symptôme de racisme, de classisme, d’homophobie, de sexisme, de discrimination religieuse, de discrimination ethnique ou d’autres formes de préjugés ou de discrimination. Elle peut également être fondée entre autres sur la taille, l’apparence, les habiletés ou d’autres facteurs réels ou perçus. Les perceptions sur les différences sont souvent fondées sur des stéréotypes perpétués dans la société en général.

En tant qu’avocats en droit de l’emploi et du travail, nous suivons attentivement ces questions et d’autres enjeux importants dans divers secteurs. En ce qui concerne la prévention et l’intervention en matière d’intimidation dans celui de l’éducation, nous recommandons aux administrateurs scolaires de garder à l’esprit les critères suivants :

  • L’établissement de politiques et de procédures durables et efficaces nécessite une approche globale, c’est-à-dire une approche qui mobilise les étudiants, les parents, le personnel de l’école ainsi que les membres et les organisations de la collectivité environnante. La mobilisation sur tous ces plans permet d’établir des politiques et des procédures qui prévoient les problèmes avant qu’ils ne surviennent.
  • Les mesures à prendre doivent tenir compte de diverses politiques de l’école. Ces politiques comprennent non seulement le plan de prévention et d’intervention en matière d’intimidation, mais aussi le code de déontologie, les politiques d’équité et d’inclusion, les politiques sur la déclaration des incidents, les protocoles d’interaction police-conseil scolaire et les politiques de protection des renseignements personnels des étudiants.
  • Les moyens pris pour y arriver sont souvent aussi importants que les résultats. La mise en œuvre de processus et de pratiques équitables et transparents pour contrer l’intimidation peut s’avérer essentielle afin que les décisions des écoles soient défendables, cohérentes au fil du temps et qu’elles tiennent compte des circonstances entourant chaque cas.
  • Soyez conscients des situations inédites qui sont source de complexité et d’incertitude. Dans ces situations, il peut s’avérer approprié et nécessaire de consulter le conseil scolaire et un conseiller juridique en vue d’adopter une ligne de conduite.

Parler d’identité de genre en classe
La façon d’aborder le genre en contexte professionnel et social évolue. Dans bien des contextes, on se présente de plus en plus souvent en donnant son nom et son pronom. Ces changements ont amené de nombreuses personnes à parler davantage de l’identité de genre.

Naturellement, on en parle aussi à l’école et en classe, où enseignants et administrateurs sont amenés à aborder le sujet avec leurs étudiants, notamment dans le contexte de l’intimidation et de ses répercussions. Lorsqu’on aborde l’identité de genre en classe, les situations varient énormément et bon nombre de politiques et d’obligations juridiques peuvent entrer en jeu.

Une décision récente du Tribunal des droits de la personne de l’Ontario portait sur un cas où les parents d’un élève avaient contesté la façon dont un enseignant de première année avait abordé le sujet de l’identité de genre en répondant aux questions des élèves. Après avoir décidé que la conduite de l’enseignant n’avait pas enfreint le Code des droits de la personne de l’Ontario, le Tribunal a formulé les points suivants sur la façon d’aborder l’identité de genre en classe :

  • En parler, ce n’est pas discriminer. Le Tribunal a conclu que parler du concept de genre et des identités de genre autres que masculin et féminin ne constituait pas de la discrimination envers les personnes qui se définissent comme hommes ou comme femmes.
  • L’inclusion est essentielle. Le Tribunal a affirmé que les propos qui ne visent pas certaines personnes ou certains groupes présentent généralement peu de risque de contrevenir au Code des droits de la personne.
  • Le Code des droits de la personne de l’Ontario tient compte de la discrimination historique. Le Tribunal a confirmé son principe de longue date selon lequel la protection du Code des droits de la personne ne s’applique pas de la même façon à toutes les identités de genre, et que le Code vise à protéger les personnes appartenant à des groupes qui ont toujours été victimes de discrimination. En règle générale, le Tribunal des droits de la personne ne rendra donc pas de décisions en faveur de demandes de changements systémiques allant à l’encontre de cette protection.
  • On peut remédier à la discrimination par un suivi approprié. Le Tribunal estime que même lorsque les propos d’un enseignant ont pour effet de créer un milieu de vie malsain et dénotent une discrimination fondée sur l’identité de genre, des mesures correctives et des excuses présentées sans délai peuvent remédier à une infraction au Code.

Ces précisions importantes du Tribunal des droits de la personne servent de précieuses balises pour les écoles et les conseils scolaires, alors que l’évolution des perceptions collectives de l’identité de genre continuent de susciter de nouvelles discussions en classe. Elles font aussi de l’éducation une expérience plus gratifiante et un investissement plus fructueux pour tous.

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