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Le projet de loi de finances pour 2025 a – enfin – été publié le jeudi 10 octobre 2024.

Il s’inscrit dans un contexte politique inédit, marqué par l’absence de majorité claire à l'Assemblée nationale, et la mise en œuvre, concomitante, d’une procédure d’infraction pour déficit excessif à l'encontre de la France par le Conseil de l'UE (le déficit devrait excéder 6 % du PIB en 2024). Aussi, le nouveau Gouvernement a annoncé un objectif de réduction du déficit à 5 % dès 2025, avec l’ambition de revenir en 2029 sous le plafond des 3 % de PIB nécessaires au respect des obligations de la France au niveau de l’Union européenne. En 2025, cette trajectoire représente un effort de recettes supplémentaires de presque 20 milliards d’euros (assortie d’une réduction des dépenses de 40 milliards d’euros) : 13,7 milliards viseront les entreprises et 5,7 milliards les particuliers.

Le texte initial du projet de loi contient plusieurs mesures annoncées par le Premier ministre – la surtaxe d’impôt sur les sociétés (qui devrait rapporter 8,5 mds€), la création d’une contribution différentielle sur les hauts revenus, ou encore la taxe sur les rachats d’actions et le report de la suppression de la CVAE. D’autres mesures, pourtant elles aussi annoncées, n’y figurent pas mais pourraient être présentées au cours des débats par voie d’amendements : c’est par exemple le cas des modifications éventuelles portant sur le crédit d’impôt recherche ou le pacte Dutreil. Enfin, certains arbitrages semblent définitifs (indexation du barème de l’IR).

Au vu du contexte politique, de nombreux amendements devraient être déposés au cours de l’examen du projet de loi – qui débutera dès mercredi 16 octobre en Commission des finances. L’absence de majorité nous empêche toutefois d’anticiper les mesures qui pourraient être adoptées.

CORPORATE TAX

Report de trois ans de la suppression progressive de la CVAE (art. 15)

La loi de finances pour 2023 avait acté la suppression progressive de la CVAE sur deux ans. Les taux de la CVAE due par les redevables au titre de l’année 2023 ont ainsi été diminués de 50 %  dans la perspective d'une suppression complète en 2024 (voir notre alerte). Toutefois, la loi de finances pour 2024 a reporté une première fois le calendrier de cette suppression en la lissant sur quatre exercices, jusqu’en 2027 (voir notre alerte). La loi de finances pour 2025 reporte à nouveau cette mesure en différant la baisse du taux de CVAE à 2028 et 2029 pour une suppression en 2030.

Les taux de CVAE demeureraient ainsi au niveau de 2024 pour les années 2025 à 2027, soit un taux maximal « théorique » de 0,28 %. Par la suite, ce taux serait réduit à 0,19 % en 2028, à 0,09 % en 2029, et la CVAE serait entièrement supprimée en 2030.

Tableau des taux de CVAE par année

Chiffres d'affaires (en €) FY 2024 FY 2025 FY 2026 FY 2027 FY 2028 FY 2029
Inférieur à 500 000 0 % 0 % 0 %
Entre 500 000 et 3 000 000 0,094 % × (CA - 500 000 €) / 2,5 M€ 0,063 % × (CA - 500 000 €) / 2,5 M€ 0,031 % × (CA - 500 000 €) / 2,5 M€
Entre 3 000 000 et 10 000 000 0,094 % + 0,169 % × (CA - 3 M€) /7 M€ 0,063 % + 0,113 % × (CA - 3 M€) /7 M€ 0,031 % + 0,056 % × (CA - 3 M€) /7 M€
Entre 10 000 000 et 50 000 000 0,263 % + 0,019 % × (CA – 10 M€) / 40 M€ 0,175 % + 0,013 % × (CA – 10 M€) / 40 M€ 0,087 % + 0,006 % × (CA – 10 M€) / 40 M€
Supérieur à 50 millions 0,28 % 0,19 % 0,09 %

Les ajustements relatifs au plafonnement de la contribution économique territoriale en fonction de la valeur ajoutée (CET), ainsi que l’évolution du taux de la taxe additionnelle à la CVAE affectée à CCI France (TA CVAE), seraient reportés et ajustés en conséquence.

Instauration d’une contribution exceptionnelle sur l'IS des grandes entreprises (art. 11)

Afin de redresser les comptes publics, il serait institué, au titre des deux exercices consécutifs clos à compter du 31 décembre 2024, une contribution exceptionnelle sur l'impôt sur les sociétés (IS) calculé sur le résultat imposable des grandes entreprises passibles de l’IS qui réalisent un chiffre d’affaires supérieur ou égal à 1 milliard d’euros. La mesure devrait concerner plus de 350 entreprises en France.

A noter, le projet reprend, dans le principe, la contribution exceptionnelle de 15 % instaurée en 2017, qui était due par les entreprises ayant réalisé un chiffre d’affaires supérieur à 1 milliard d’euros (BOI-IS-AUT-35). La loi de finances rectificative pour 2017 prévoyait une contribution additionnelle de 15 % de l’IS qui était due par les entreprises ayant réalisé un chiffre d’affaires supérieur à 3 milliards d’euros.

L’assiette de la contribution exceptionnelle serait égale à l’impôt sur les sociétés calculé sur l’ensemble des résultats imposables aux différents taux prévus à l’article 219 du CGI (i.e. taux normal et taux réduits), avant imputation des réductions et crédits d’impôts et des créances fiscales de toute nature.

Le taux de la contribution exceptionnelle est différencié selon le CA et l’exercice concerné (FY 2024 ou FY 2025).

Taux de la contribution exceptionnelle sur l’IS des grandes entreprises

Taux d'application selon l'exercice Entreprises dont le CA est supérieur ou égal à 1 m€ Entreprises dont le CA est supérieur ou égal à 3 md€
1er exercice (FY 2024) 20,6 % (TEI 30,97 %) 41,2 % (TEI 36,125 %)
2nd exercice (FY 2025) 10,3 % (TEI 28,4 %) 20,6 % (TEI 30,975 %)

A noter, un dispositif est prévu pour limiter les effets de seuil (entreprises dont le CA est supérieur ou égal à 1 md€ et inférieur à 1,1 md€ ou supérieur ou égal à 3 mds€ et inférieur à 3,1 mds€).

A noter, le chiffre d’affaires s’entendrait du CA réalisé en France par le redevable au cours de l’exercice ou de la période d’imposition, ramené à 12 mois. En présence d’un groupe d’intégration fiscale, serait prise en compte la somme des chiffres d’affaires de chacune des sociétés membres de ce groupe.

Les créances fiscales, ainsi que les réductions et crédits d’impôts ne seraient pas imputables sur la contribution exceptionnelle. Par ailleurs, la contribution ne serait pas déductible du résultat imposable à l’IS.

La taxe devra être payée spontanément au plus tard au versement du solde de l’impôt sur les sociétés (i.e. 15 mai 2025 et 2026 pour une entreprise clôturant aux 31 décembre 2024 et 2025). Pour les groupes de sociétés bénéficiant du régime d’intégration fiscale, la contribution exceptionnelle serait due par la mère.

Contribution exceptionnelle sur le résultat d'exploitation des grandes entreprises de transport maritime (art. 12)

Serait instaurée au titre des deux exercices consécutifs clos à compter du 31 décembre 2024, une contribution exceptionnelle sur le résultat d'exploitation des grandes entreprises de transport maritime qui réalisent un chiffre d’affaires supérieur ou égal à 1 milliard d’euros.

A noter, sont concernées les entreprises qui déterminent leur résultat imposable à l’IS dans les conditions prévues à l’article 209-0 B du CGI (taxe de tonnage).

L’assiette de la taxe exceptionnelle est égale au résultat d’exploitation reporté dans le compte de résultat mentionné au II de l’article 38 de l’annexe III du CGI (dans sa version applicable au 31 décembre 2024, pour la part correspondant aux opérations à raison desquelles l’option prévue à l’article 209-0 B du même code a été exercée).

Taux de la contribution exceptionnelle sur le résultat d'exploitation des grandes entreprises de transport maritime

Taux applicable selon l'exercice Entreprises dont le CA est supérieur ou égal à 1 md€
Taux applicable pour l’exercice 2024 9 %
Taux applicable pour l’exercice 2025 5,5 %

 

A noter, pour les entreprises membres d’un groupe, la contribution exceptionnelle serait due par chaque entreprise remplissant individuellement la condition tenant au chiffre d’affaires.

Les créances fiscales, ainsi que les réductions et crédits d’impôts ne seraient pas imputables sur la contribution exceptionnelle. Par ailleurs, la contribution ne serait pas déductible du résultat imposable.

La taxe serait liquidée, comme la contribution exceptionnelle sur les bénéfices des grandes entreprises, au plus tard au versement du solde de l’impôt sur les sociétés (i.e. 15 mai 2025 et 2026 pour une entreprise clôturant aux 31 décembre 2024 et 2025).

Aménagement du régime des fusions et opérations assimilées (art. 17)

Les dispositions régissant le régime juridique des opérations de fusions, scissions et apports partiels d’actifs ont été modifiées par l’ordonnance n° 2023-393 du 24 mai 2023 (ratifiée par l’article 4 de la loi n° 2024-364 du 22 avril 2024), qui transpose en droit interne la Directive mobilité du 27 novembre 2019 relative aux opérations sociétaires transfrontalières au sein de l’Union européenne. Cette ordonnance a notamment introduit :

  • Un nouveau cas de fusion sans échange de titres lorsque les associés des sociétés qui fusionnent conservent les mêmes proportions de détention à l'issue de l'opération (C. com., art. L. 236-3, II, 4°) ;
  • La scission partielle, définie comme l’opération par laquelle, à la suite d’un apport partiel d’actifs, les parts ou actions de la société apporteuse, « de la ou des sociétés bénéficiaires ou à la fois de la société qui apporte une partie de son actif et de la ou des sociétés bénéficiaires représentant la contrepartie de l'apport seront attribuées directement aux associés de la société qui apporte une partie de son actif » (C. com., art. L. 236-27, al. 2). Elle concerne les opérations nationales comme transfrontalières.
  • Une nouvelle définition de l’apport partiel d’actif, qui se définit désormais comme l’opération par laquelle une société « apporte une partie de son actif et, le cas échéant, une partie de son passif à une ou plusieurs sociétés existantes ou nouvelles » (C. com., art. L. 236-27, al. 1).

D’un point de vue comptable, l’ANC avait tiré, dès novembre 2023, les conséquences de cet aménagement du régime juridique des opérations de restructuration au travers du règlement n° 2023-08 du 22 novembre 2023 (homologué par arrêté du 26 décembre 2023).

Le PLF 2025 prévoit les aménagements nécessaires afin de permettre aux opérations nouvellement créées de bénéficier du régime fiscal de faveur en matière d’IS :

□ Nouveau cas de fusion sans échange de titres

Afin d’assurer cette neutralité fiscale en matière d’IS, un aménagement des textes applicables est prévu (i.e. régime de faveur en matière d’impôt sur les sociétés, détermination du bénéfice net, régime mère-fille, régime fiscal des plus ou moins-values).

□ Scission partielle (apport-attribution)

Afin d’assurer l’éligibilité de la nouvelle opération de scission partielle au régime de faveur des fusions, la définition de l’apport partiel d’actif, au sens et pour l’application de ce régime, serait modifiée pour inclure également les opérations de scission partielle (CGI, art. 210 0A, 4° nouveau).

Par ailleurs, le régime de faveur en matière d’impôt de distribution (CGI, art. 115, 2 modifié) serait modifié afin d’intégrer les spécificités propres aux opérations de scissions partielles.

Ces mesures seraient applicables aux opérations dont le projet est déposé au greffe du tribunal de commerce à compter du 1er juillet 2023 (par renvoi à l’article 13 de l’ordonnance n°2023-393 du 24 mai 2023 portant réforme du régime des fusions, scissions, apports partiels d’actifs et opérations transfrontalières des sociétés commerciales).

Instauration d’une taxe sur les réductions de capital consécutives au rachat de leurs propres titres (art. 26)

Serait créée une taxe sur les réductions de capital consécutives au rachat par les entreprises de leurs propres titres en vue de les annuler. Cette mesure ne s'appliquerait qu'aux entreprises, dont le siège est en France, ayant réalisé, au cours du dernier exercice clos, un chiffre d’affaires hors taxes (tel qu’il résulte des comptes consolidés ou combinés, le cas échéant) supérieur à 1 milliard d’euros.

La taxe, dont le taux est fixé à 8 %, serait assise sur le montant de la réduction de capital, et sur une fraction des sommes revêtant au plan comptable le caractère de primes liées au capital. Le projet détaille les modalités de calcul de l’assiette, notamment en cas de réductions de capital successives.

Elle ne serait pas applicable lorsque la réduction de capital est réalisée en vue de compenser une augmentation de capital visant à intéresser le personnel au capital de l’entreprise. Il en irait de même lorsque la réduction de capital entend faciliter une fusion ou une scission par rachat et annulation d’actions représentant au plus 0,25 % du capital social.

La taxe nouvelle, applicable aux réductions de capital réalisées à compter du 10 octobre 2024, ne serait pas déductible de l’assiette de l’impôt sur les sociétés. Elle devrait être déclarée et liquidée sur l’annexe à la déclaration de TVA, et acquittée lors de son dépôt.

A noter, ce projet se distingue des propositions des années précédentes, notamment par l’assiette et le taux retenus. Par exemple, dans le cadre du PLF pour 2024, un amendement – adopté par la commission des finances de l’Assemblée Nationale lors de la première lecture  – prévoyait la création d’une taxe sur les rachats d’actions fixée à 1 % de la valeur d’acquisition des actions, applicable aux entreprises cotées dont le chiffre d’affaires excède 1 milliard d’euros (amendement n° I-CF2826, Mattei). En avril 2024, des députés ont repris ce dispositif dans le cadre d’une proposition de loi (proposition de loi n° 2540, 16ème législature).

Si ce projet est adopté, la France suivra l’exemple des Etats-Unis, qui imposent déjà les rachats d’actions depuis le 1er janvier 2023.

Pour rappel, sous la présidence de Joe Biden, le législateur américain a institué une taxe de 1 % de la valeur réelle des actions propres rachetées par les entreprises cotées ( « Excise tax on corporate stock repurchases »). La candidate démocrate Kamala Harris est favorable à une augmentation de ce taux à 4 %.

Clarification des modalités de calcul de l’atténuation des variations de valeurs locatives des locaux professionnels (art. 16)

Depuis le 1er janvier 2017, tous les locaux entrant dans le champ de la révision des valeurs locatives des locaux professionnels disposent d’une valeur locative mise à jour, déterminée en fonction de l’état du marché locatif. Afin d’atténuer les effets de seuil de cette réforme, des mécanismes amortisseurs ont été mis en place. Une modification technique est apportée à l’article 1518 A du CGI afin de légaliser, à compter des impositions dues au titre de 2023, un « planchonnement » figé, calculé selon la situation des locaux au 1er janvier 2017. Par deux décisions du 3 avril 2024, le Conseil d’État avait considéré que ce dernier mécanisme, dont bénéficie chaque local existant au 1er janvier 2017, n’est pas figé à cette date, mais que la valeur locative révisée employée pour le déterminer doit être recalculée chaque année (n° 474735 et 474736). La mesure nouvelle aura pour effet de priver d’effet ces décisions.

FISCALITÉ DES PARTICULIERS

Instauration d’une imposition minimale temporaire pour les plus hauts revenus (art. 3)

Traduisant la volonté du Gouvernement de faire participer les personnes physiques les plus fortunées à la réduction du déficit public, une imposition effective minimale temporaire de 20 % « des plus hauts revenus » serait instaurée à compter de l’imposition des revenus de l’année 2024 et jusqu’à l’imposition des revenus de l’année 2026.

Seraient assujettis à cette contribution différentielle, les contribuables fiscalement domiciliés en France dont le revenu du foyer fiscal (revenu fiscal de référence) excède 250 000 € pour les contribuables célibataires et 500 000 € pour les contribuables soumis à imposition commune, lorsque leur taux effectif d’imposition est inférieur à 20 % de leur revenu fiscal de référence ajusté. Selon l’exposé des motifs de la mesure, cette contribution ne concernerait que « quelques dizaines de milliers de foyers fiscaux ».

L’imposition prise en compte pour le calcul du taux effectif d’imposition correspondrait à la somme de l’impôt sur le revenu, de la contribution sur les hauts revenus et de certains prélèvements libératoires de l’impôt sur le revenu. Elle serait majorée :

  • de 1 500 € par personne à charge et de 12 500 € pour les contribuables soumis à imposition commune et
  • de l’avantage en impôt procuré par diverses réductions d’impôt et certains crédits d’impôt, limitativement énumérés, ainsi que des crédits d’impôt prévus par les conventions fiscales internationales, dans la limite de l’impôt dû.

La contribution serait égale à la différence entre l’imposition ainsi calculée et 20 % du revenu fiscal de référence ajusté. Afin d’atténuer l’effet de seuil d’entrée dans le champ d’application de cette contribution, un mécanisme de décote serait prévu.

Sécurisation des modalités d’imposition applicables aux personnes non-résidentes de France (art. 23)

Le Conseil d’Etat a récemment précisé que pour l’application de la retenue à la source prévue à l’article 182 A du CGI, la condition tenant à ce que le salarié soit fiscalement domicilié en France doit être appréciée au regard de la notion du domicile fiscal telle que définie en droit interne à l’article 4 B du CGI, quand bien même le bénéficiaire des revenus en cause pourrait « être regardé, en application des stipulations d'une convention fiscale conclue avec un autre Etat, comme résident de cet autre Etat et non comme résident de France » (CE, 5 février 2024, n° 469771, société Axa Technology Services). Il avait ainsi infirmé l’interprétation retenue par l’Administration dans son BOFiP (BOI-INT-DG-20-10-10, n° 20 et s.).

Pour autant, l’administration fiscale avait maintenu au BOFiP son interprétation de la condition de domiciliation fiscale hors de France, dans un objectif de stabilité et ce, dans l'attente de sa légalisation.

La primauté de la notion de résident en droit conventionnel sur celle de domicile fiscal en droit interne serait ainsi désormais légalement prévue.

Concrètement, la décision du Conseil d’Etat est privée d’effet pratique. Le champ d’application de la retenue à la source de l’article 182 A du CGI est préservé pour l’impôt sur le revenu dû au titre de l’année 2024 et des années suivantes.

Aménagement du régime des bons de souscription de parts de créateur d'entreprise (BSPCE) (art. 25)

Les bons de souscription de parts de créateur d'entreprise (BSPCE) constituent un outil d'intéressement des salariés et dirigeants permettant à de jeunes entreprises de les inciter à leur développement. Ces bons confèrent à leur détenteurs le droit de souscrire des titres représentatifs du capital de la société émettrice à un prix fixé au jour de leur attribution. Le gain net réalisé lors de la cession des titres souscrits en exercice de ces bons bénéficie alors d’un régime fiscal de faveur ad hoc, à savoir une imposition selon le régime de droit commun des plus-values de cession de valeurs mobilières des particuliers (CGI, art. 163 bis G).

Afin de tenir compte de deux récentes décisions du Conseil d’Etat (CE, 5 février 2024, n° 476309 et CE, 8 décembre 2023, n° 482922) et, selon l’exposé des motifs de l’article du projet de loi, de « clarifier les règles applicables et d’éviter le cumul des avantages fiscaux », le régime des BSPCE serait aménagé ainsi :

  • Légalisation de l’interdiction d’inscrire des BSPCE et des titres souscrits en exercice de ceux-ci dans un PEA, PEA-PME, PEE, PEI ou PERCO.
    Cette mesure s’appliquerait à compter du 10 octobre 2024, étant précisé que des modalités particulières d’entrée en vigueur sont prévues pour les bons inscrits dans de tels plans avant cette date.
  • Distinction du gain d’exercice des BSPCE du gain de cession des titres souscrits en exercice de ces bons :
    • Le gain d’exercice serait imposé à l’impôt sur le revenu au taux forfaitaire de 12,8 % et soumis aux prélèvements sociaux, au titre de l'année de disposition, de cession, de conversion au porteur ou de mise en location des titres souscrits en exercice de bons (ou des actions reçues en échange en cas d’échange sans soulte des titres souscrits en exercice de bons).
    • Le gain net de cession des titres souscrits en exercice des bons resterait quant à lui imposé selon le régime de droit commun des plus-values de cession de valeurs mobilières des particuliers (ouvrant droit au bénéfice des dispositions de sursis et de report d’imposition en vigueur). Cette mesure s’appliquerait au titre des dispositions, cessions, conversions au porteur ou mises en location de titres souscrits en exercice de BSPCE réalisées à compter du 10 octobre 2024.

Indexation sur l’inflation du barème de l’impôt sur le revenu pour les revenus de 2024 et des grilles de taux par défaut du prélèvement à la source (art. 2)

Pour le calcul de l’impôt sur le revenu (IR) 2024, les tranches du barème de l’IR seraient alignées sur la prévision d’évolution de l’indice des prix à la consommation hors tabac de 2024 par rapport à 2023, soit 2 %. Les limites des tranches de revenus des grilles de taux par défaut du prélèvement à la source seraient ajustées en conséquence à compter du 1er janvier 2025.

INTERNATIONAL TAX

Actualisation des règles GloBE intégrant les dernières orientations administratives de l’OCDE (art. 13)

La loi de finances pour 2024 a transposé en droit interne les règles de la Directive dite « Pilier 2 » et a instauré un taux minimal d’imposition fixé à 15 % sur les bénéfices des groupes d’entreprises multinationales disposant d’une implantation en France (loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024, art. 33 ; voir notre alerte).

La transposition adoptée dans le cadre de la LF 2024 respecte le texte de la directive ainsi que les commentaires et les orientations administratives adoptées par le Cadre inclusif de l’OCDE/G20 en février et juillet 2023.

L’OCDE poursuit ses travaux et publie régulièrement de nouvelles orientations administratives, dont les deux dernières ont été rendues publiques en décembre 2023 et juin 2024.

Le projet de loi viendrait ainsi compléter le texte adopté dans le cadre de la LF 2024 et intégrer l’orientation administrative du 18 décembre 2023. Il transpose également certaines dispositions des orientations administratives du 2 février et 17 juillet 2023. Cependant, l’exposé des motifs de l’article précise que les orientations administratives publiées le 17 juin 2024 n’y sont pas incluses en raison des délais encadrant la préparation du projet de loi de finances. Pour autant, elles devraient être « transposées dans un prochain projet de loi de finances ou, s’agissant de dispositions ne relevant pas du domaine de la loi », insérées dans les commentaires qui seront publiés au BOFiP.

On notera, en outre, que certaines dispositions sont nouvelles.

Le PLF 2025 prévoit notamment les modifications suivantes :

  • Ajouts de définitions (entité non significative, entité d’investissement d’assurance, crédit d’impôt transférable),
  • Ajouts d’options : résultat qualifié d’une entité non significative issu du CA total du CbCR et impôts couverts corrigés réputés égaux au montant d’impôts sur les bénéfices dus du CbCR, inclusion dans le résultat qualifié d’une entité constitutive des plus ou moins-values sur participations,
    • Précisions sur la correction du résultat qualifié et des impôts couverts,
    • Compléments sur l’affectation spécifique des impôts couverts dus par certaines entités constitutives (ES, entité hybride),
    • Mesure de sauvegarde transitoire basée sur la déclaration pays par pays (CbCR Safe Harbour) : précisions relatives aux états financiers qualifiés servant de base à la déclaration pays par pays, clarification relative aux informations contenues dans les états financiers qualifiés à retenir et aux états financiers utilisés (EMU ou individuels consolidés, option pour les entités non significatives), précisions lorsque les états financiers des entités acquises tiennent compte de l’allocation du prix d’acquisition de celle-ci, précisions sur les retraitements à effectuer pour le test du profit de routine et pour le TEI simplifié (perte nette latente excédant 50 millions d’euros), anti-arbitration rule,
  • Précisions sur la détermination de la déduction fondée sur la substance (substance based exclusion rule),
  • Modalités de répartition de l’impôt national complémentaire entre les entités constitutives françaises du même groupe,
  • Impôt national complémentaire “super qualifié” (dispense d’impôt complémentaire) : norme de comptabilité financières utilisée (exclusivité de la source, cas de recours aux normes locales)
  • Instauration de règles de conversion monétaire,
  • Précisions sur les impôts différés et actifs transférés au titre de l’exercice de transition,
  • Création d’une solidarité lors de l’option pour la délégation de paiement prévue à l’article 1679 decies du CGI.

Transposition de la directive DAC 8 relative à l’échange d’informations sur les actifs numériques (art. 14)

Le projet de loi de finances pour 2025 prévoit la transposition de la directive 2023/2226 du 17 octobre 2023 modifiant la directive 2011/16/UE relative à l’échange automatique et obligatoire d’informations dans le domaine fiscal, en ce qui concerne les actifs numériques (dite DAC 8), dont l’application est prévue au 1er janvier 2026. De nouvelles obligations déclaratives seraient applicables aux prestataires de services sur crypto-actifs.

Les prestataires et opérateurs de services seraient ainsi tenus de collecter et déclarer des informations permettant d’identifier les transactions sur actifs numériques, les comptes utilisés pour les détenir, ainsi que les titulaires desdits comptes.

A noter, le prestataire de services est tenu d’informer chaque personne physique utilisateur de cryptoactifs que les données le concernant qui sont transférées à l’administration fiscale peuvent être communiquées à l’administration fiscale d’un autre Etat membre (CGI, art. 1649 AC quinquies nouveau, III ).

Sont par ailleurs précisées, s’agissant de l’échange d’informations sur les plateformes en ligne, les conditions dans lesquelles un opérateur de plateforme situé dans un Etat tiers peut être déchargé de ses obligations déclaratives en France (CGI, art. 1649 ter B, I, 3°).

AUTRES MESURES

Mise en conformité avec le droit de l’UE des taux réduits de TVA sur les opérations liées au chauffage (art. 10)

Conformément à l’article 17 de la directive (UE) 2024/1275 du 24 avril 2024 sur la performance énergétique des bâtiments, les opérations suivantes, actuellement soumises à un taux réduit de TVA (10 % ou 5,5 %), relèveraient du taux normal de 20 % à compter du 1er janvier 2025 :

  • fourniture ou installation d’une chaudière susceptible d’utiliser des combustibles fossiles ;
  • prestations de rénovation énergétique comprenant la fourniture ou l’installation d’une chaudière susceptible d’utiliser des combustibles fossiles.

Les travaux d’entretien ou de réparation sur les chaudières existantes resteraient éligibles aux taux réduits.

Par ailleurs, les énergies renouvelables dont l’utilisation majoritaire dans un réseau de chauffage permet l’application du taux de 5,5 % sur la part « fourniture » seraient définies par renvoi au Code de l’énergie, ce qui engloberait donc explicitement l’énergie ambiante conformément à la directive du 24 avril 2024 sur la performance énergétique des bâtiments.

Augmentation des tarifs de l’accise sur l’électricité (art. 7)

Parmi les mesures concernant les accises, on peut retenir celle relative à l’accise sur l’électricité,  acquittée par les fournisseurs sur la base des quantités livrées aux consommateurs finaux (particuliers et professionnels) (CIBS, art. L. 312-1 et s.).

Les tarifs normaux de l'accise sur l'électricité exprimés en euros par mégawattheure, sont, pour les quantités d'électricité fournies entre le 1er février 2024 et le 31 janvier 2025, les suivants :

Catégorie Tarifs normaux entre le 01/02/2024 et le 31/01/2025
Ménages et assimilés 21
Petites et moyennes entreprises 20,5
Haute puissance 20,5

 

A noter, le bouclier tarifaire, mis en place en 2021, disparait progressivement entre le 1er février 2024 et le 31 janvier 2025. Les tarifs normaux d’accise en sortie de bouclier tarifaire seraient aménagés afin de garantir au consommateur une baisse de 9 % du tarif réglementé de vente en 2025 à partir du 1er février.

Les tarifs normaux de l'accise, exprimés en euros par mégawattheure, seraient, en 2025, pour chacune des catégories fiscales de l'électricité, les suivants (CIBS,   art. L. 312-37) :

Catégorie Tarifs normaux en 2025
Ménages et assimilés 25,09
Petites et moyennes entreprises 20,90
Haute puissance 20,90

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