• Marco Tomassetti, Author |
4 minutes de lecture

​Mon fils a 19 ans, et je pense que le moment est venu de lui enseigner quelques « leçons de vie ». Ainsi, en tant que spécialiste des fusions et acquisitions, j’ai pris pour exemple la récente agitation des marchés pour lui apprendre (et me rappeler) une leçon précieuse : Il ne faut pas juger le marché à un moment quelconque. Les tendances s’inscrivent dans la durée et elles finissent toujours par revenir aux facteurs fondamentaux.

Pour appuyer mon argument, je lui ai présenté un graphique d’évolution des cours qui montrait la chute d’un titre dont le cours était passé d’environ 340 $ à 250 $ en l’espace de six mois, et je lui ai posé une question simple : « Penses-tu que c’est une bonne société? ». Évidemment, il m’a répondu qu’elle semblait être une très mauvaise société et il a ajouté que si je détenais ce titre, j’avais sûrement perdu beaucoup d’argent. Je lui ai ensuite dit le nom de cette société très connue et lui ai présenté le graphique d’évolution des cours sur cinq ans, qui montre que le cours est passé de 70 $ à plus de 250 $. Tout sourire, j’avais le sentiment d’avoir démontré ce que j’avançais – le bruit à court terme, bien souvent, peut camoufler la tendance à plus long terme.

Tous les jours, on me demande ce que je pense de la situation sur les marchés des fusions-acquisitions de sociétés fermées. Les gens supposent que les transactions achoppent et que l’activité se tarit sur le marché. Après tout, en ce moment, vous ne pouvez échapper aux manchettes quotidiennes qui font état de la hausse des taux d’intérêt, de l’inflation galopante, de l’instabilité politique et de la volatilité des marchés. Oui, les marchés publics s’emballent. Oui, les taux d’intérêt montent. Oui, il y a de l’incertitude liée à l’inflation. Pourtant, de nombreuses sociétés font plus d’argent que jamais auparavant et les taux de chômage sont à leur plus bas depuis que l’on tient des statistiques. Comment peut-on s’y retrouver dans une conjoncture pareille?

Question que ce soit clair, une récession se prépare (nous y sommes probablement déjà, en fait), comme cela finit toujours par se produire dans une économie de marché fonctionnelle. Rien ne peut monter indéfiniment. Cela dit, il est important de ne pas se laisser aveugler par la situation à un moment précis; il faut plutôt regarder les tendances à long terme qui sous-tendent les fusions-acquisitions de sociétés fermées.

Avant la pandémie, les fusions-acquisitions de sociétés fermées étaient en plein essor, alimentées par la vague de départs à la retraite de baby-boomers, des taux d’intérêt qui n’avaient jamais été aussi bas, des masses de capitaux disponibles à la recherche de bons investissements et, bien entendu, la forte croissance des entreprises. La décennie précédant 2020 a effectivement été très favorable au marché des fusions-acquisitions de sociétés fermées. Puis, en 2020, l’arrivée de la COVID-19 a eu pour effet de paralyser artificiellement l’économie, partout dans le monde, d’un coup. Une expérience, si l’on peut dire, qui n’avait jamais été tentée auparavant dans l’histoire du capitalisme.

Pendant cette période, des transactions ont échoué, des processus transactionnels ont été mis en veilleuse et le climat était morose. Maintenant, faisons le saut en 2021, alors que se conjuguent les bas taux d’intérêt, les plans de relance des gouvernements et la demande refoulée des consommateurs : les consommateurs (et les marchés), affamés, ont fait un retour en force. La demande, combinée aux contraintes liées à la chaîne d’approvisionnement, a permis aux entreprises de hausser leurs prix et, dans bien des cas, d’engranger des profits records. On se souviendra aussi de l’année 2021 comme de celle où une foule de gens se sont vantés en toute ignorance de l’appréciation de leur portefeuille d’actions et de leur maison qui avait pris tellement de valeur. Et maintenant, revenons aux montagnes russes de 2022, alors qu’il est question de récession tous les jours aux nouvelles. Pas étonnant que les gens se cassent la tête pour répondre à une question bien précise : est-ce le bon moment pour acheter ou vendre une entreprise?

Eh bien, pour répondre à cette question, il faut examiner les facteurs fondamentaux à plus long terme qui sous-tendent les fusions-acquisitions de sociétés fermées. Comme le nombre de propriétaires d’entreprises qui appartiennent à la génération des baby-boomers n’a pas changé, des transactions devront être conclues. La quantité de capitaux privés qui ciblent des acquisitions d’entreprises n’a jamais été aussi importante, tout comme les liquidités et la capacité d’emprunt au bilan des sociétés. Les taux d’intérêt, malgré qu’ils soient en hausse, oscillent encore autour de leur plus bas en 20 ans. Ainsi, nous sommes toujours dans un contexte de coûts relativement faibles et d’abondance de capitaux.

Il est difficile de prétendre que les fondamentaux du marché des fusions-acquisitions de sociétés fermées ne sont pas à un point fort du cycle à moyen ou à long terme, donc selon moi, au final, c’est une question de confiance dans le rendement des entreprises. Si les investisseurs et les acheteurs ne comprennent pas la notion de bénéfices durables, ils auront de la difficulté à fixer le prix des entreprises aux fins des transactions. L’inflation et les problèmes de chaîne d’approvisionnement qui perdurent embrouillent ce que l’on voit devant à travers le pare-brise, mais on peut présumer que ce champ de vision s’éclaircira dans un trimestre ou deux.

Alors, est-ce que je crois que les marchés sont horribles? Ils peuvent paraître médiocres à certains moments, mais, comme pour mon placement dans la société bien connue dont il est question plus haut, je suis très optimiste à l’égard des fondamentaux, je double la mise et j’opte pour l’expansion!

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