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Entraîne l'application d'une amende égale à 50 % du montant de la transaction le fait, pour un fournisseur redevable de la taxe sur la valeur ajoutée, de ne pas délivrer une facture (CGI, art. 1737, I, al. 4, dans sa rédaction résultant de l'ordonnance du 7 décembre 2005). Toutefois, lorsque le fournisseur apporte, dans les 30 jours de la mise en demeure adressée par l'administration fiscale, la preuve que l'opération a été régulièrement comptabilisée, l’amende encourue est réduite à 5 % du montant de la transaction.

Inconstitutionnalité de l’amende due en cas de défaut de délivrance d’une facture

Le Conseil constitutionnel vient de déclarer ces dispositions contraires au principe de proportionnalité des peines.

Il juge qu’en réprimant des comportements visant à faire obstacle, d'une part, au contrôle des comptabilités tant du vendeur que de l'acquéreur d'un produit ou d'une prestation de service et, d'autre part, au recouvrement des prélèvements auxquels ils sont assujettis, le législateur a poursuivi un objectif de valeur constitutionnelle de lutte contre la fraude fiscale.

Toutefois, il considère que ces dispositions peuvent donner lieu à une sanction manifestement disproportionnée au regard de la gravité du manquement constaté, comme de l'avantage qui a pu en être retiré. Il relève ainsi que l’amende n’est pas plafonnée, qu’elle soit égale à 50 % du montant de la transaction ou à 5 % de ce montant, et que son taux est fixe. De plus, l’amende de 50 % reste due, alors même que la transaction a été régulièrement comptabilisée, si le fournisseur n'apporte pas la preuve de cette comptabilisation dans les 30 jours suivant la mise en demeure de l'administration fiscale. Il en va de même s’agissant de l’amende de 5 %, quand bien même le fournisseur justifierait d'une comptabilisation régulière de la transaction permettant à l'Administration d'effectuer des contrôles. 

Par suite, si ces amendes poursuivent un objectif de répression des manquements aux règles relatives à l’établissement des factures, elles méconnaissent le principe de proportionnalité des peines.

L’abrogation immédiate des dispositions en cause entrainerait des conséquences manifestement excessives selon le Conseil constitutionnel. Celui-ci a décidé de reporter cette abrogation au 31 décembre 2021.

Cet effet retardé de la censure de l’amende laisse donc le temps à l’Administration fiscale de revoir sa copie, à l’automne, dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances pour 2022. Cette révision de l’amende est d’autant plus prévisible qu’elle constitue une sanction applicable dans le cas où la piste d’audit fiable ne permet pas de garantir l’authenticité des factures émises. 

Dans l’intervalle, les redevables ne pourront se prémunir de la décision prise par le Conseil constitutionnel pour contester les mesures prises avant le 31 décembre 2021, sauf à contester l’effet retardé de cette décision devant la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH). 

En pratique, ce qui change pour vous :

■    Pour les personnes qui ont été sanctionnées au titre de cette amende avant le 31 décembre 2021, la seule voie de recours semble résider dans une saisine de la CEDH afin de contester la décision rendue par le Conseil (bien que la sanction du dispositif par le Conseil Constitutionnel est à l’évidence un nouvel argument en faveur du contribuable) ;
 
■    Pour les personnes qui sont actuellement en cours de contrôle fiscal, l’Administration fiscale pourrait être tentée de notifier le plus rapidement possible afin d’appliquer cette pénalité. Il est sûrement probable que le nouveau dispositif sera plus proportionné à l’infraction réellement commise. Par conséquent, il sera intéressant d’observer la positon de l’Administration fiscale dans la période intermédiaire.
 
En tout état de cause, la position du Conseil Constitutionnel est intéressante au regard d’autres sanctions ou pénalités (infraction sur les logiciels de caisse, etc.).
Inconstitutionnalité de l’amende due en cas de défaut de délivrance d’une facture


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