• 1000

La Direction générale de la Concurrence de la Consommation et de la Répression des fraudes (DGCCRF) a publié ce 1er octobre 2025 un communiqué présentant le bilan de son activité en matière de lutte contre les allégations environnementales trompeuses – aussi appelées greenwashing - pour les années 2023 et 2024 et annonçant le renforcement de ses actions en la matière pour les prochaines années. Cette communication qui fait suite à de nombreuses publications et initiatives confirme l’activisme de la DGCCRF en la matière comme en témoignent : 

  • la tenue le 1er octobre 2025 d’une matinale sur le thème des «  nouveaux horizons de la lutte contre l’écoblanchiment  ». 

RAPPEL SUR L’INTERDICTION DES ALLÉGATIONS ENVIRONNEMENTALES TROMPEUSES

Les allégations environnementales recouvrent tous les messages ou déclarations volontaires, sous tout format (texte, image, symbole, marque, dénomination sociale, dénomination de produit), diffusées dans le contexte d’une communication commerciale dont l’objet est d’affirmer ou de suggérer qu’un produit, une catégorie de produits, une marque ou un professionnel aurait une incidence positive ou nulle sur l’environnement, serait moins préjudiciable pour l’environnement que d’autres, ou aurait amélioré son incidence environnementale au fil du temps.6

Dès lors qu’elles sont de nature à influencer le choix des consommateurs, de telles allégations sont susceptibles d’être sanctionnées sur le fondement de l’article L121-2 du code de la consommation prohibant les pratiques commerciales trompeuses. A l’occasion de loi dite Climat7 le législateur avait d’ailleurs complété ce texte en visant expressément les allégations relatives « à l’impact environnemental  » d’un bien ou d’un service parmi les allégations portant sur une «  caractéristique essentielle du bien ou du service ». 

 Aux termes de l’article L132-1 du code de la consommation les pratiques commerciales trompeuses sont passibles d’une peine d’emprisonnement de deux ans et d'une amende de 300 000 euros, ces peines étant portées à cinq ans d'emprisonnement et à 750 000 euros d'amende lorsque l'infraction a été commise par l'utilisation d'un service de communication au public en ligne ou par le biais d'un support numérique ou électronique. Le texte prévoit également que le montant de l'amende peut être porté, de manière proportionnée aux avantages tirés du délit, à 10 % du chiffre d'affaires moyen annuel, calculé sur les trois derniers chiffres d'affaires annuels connus à la date des faits, ou à 50 % des dépenses engagées pour la réalisation de la publicité ou de la pratique constituant ce délit. Ce dernier taux peut être porté à 80 % lorsqu’il s’agit d’allégations environnementales trompeuses.

A ces peines principales s’ajoutent des peines complémentaires, notamment celle de la publication de la condamnation, aggravant ainsi le risque réputationnel pour l’entreprise concernée.

A la demande de tiers et notamment de concurrents, les juridictions civiles ou commerciales peuvent également sanctionner toute allégation environnementale trompeuse sur le fondement de la concurrence déloyale.

UNE ENQUÊTE MULTI-SECTORIELLE ET DE NOMBREUX MANQUEMENTS SANCTIONNÉS

Plus de 3 000 établissements ont été contrôlés par la DGCCRF au cours des années 2023 et 2024. Plus de 15 % des contrôles effectués ont caractérisé des manquements graves qui ont donné lieu à 430 injonctions de mise en conformité, 500 avertissements et 70 amendes administratives et procès-verbaux pénaux. 

Le communiqué de la DGCCRF indique que les enquêtes menées ont concerné de nombreux secteurs, notamment les secteurs du textile, de l’ameublement, des cosmétiques, de l’hôtellerie, des services de ménages à domicile, ou encore des produits alimentaires. Toute entreprise est donc concernée par le risque de voir sa communication – commerciale évidemment mais également institutionnelle comme le rappelle la DGCCRF – contrôlée et, le cas échéant, sanctionnée sur le fondement du greenwashing sans considération du secteur d’activité.

OBLIGATION DE JUSTIFICATION ET DE PRÉCISION

La DGCCRF rappelle l’exigence selon laquelle les allégations environnementales doivent être suffisamment justifiées et précises, et ne doivent pas être génériques ou globalisantes

Citant plusieurs exemples, la DGCCRF a ainsi considéré qu’étaient globalisantes et ne permettaient pas d’identifier un impact environnemental clair et significatif des mentions telles que «  Livraison éco-responsable », « parpaing vert  » et «  préservant la planète  »

L’allégation «  produits sains pour vous, pour moi et bons pour l’environnement  » a fait l’objet d’une demande de retrait par la DGCCRF. Nous observerons qu’une telle mention est en outre susceptible de contrevenir à l’article L 541-9-1 du code de l’environnement aux termes duquel «  il est interdit de faire figurer sur un produit ou un emballage les mentions «  biodégradable  », « respectueux de l'environnement  » ou toute autre mention équivalente ». Comme la DGCCRF le souligne par ailleurs8, cet article issu de la loi Anti-gaspillage pour une économie circulaire (dite loi «  AGEC ») du 10 février 2020 devra être complété afin de tenir compte des dispositions de la Directive (UE) 2024/825 du 28 février 2024 qui prévoient que de telles allégations seraient acceptables si le produit bénéficie d’un écolabel européen ou d’un autre label écologique de type 1 officiellement reconnu dans les Etats-Membres et que le professionnel est en mesure d’en justifier. 

Par ailleurs, la DGCCRF rappelle le contrôle ayant abouti à la sanction infligée à un acteur de la fast fashion, notamment en raison de l’allégation selon laquelle ce dernier limiterait son impact environnemental en diminuant de 25 % ses émissions de gaz à effet de serre alors qu’il n’était pas en mesure de la justifier. Dans cette affaire la société s’est vu infliger une amende d’un montant de 40 millions d’euros à l’issue d’une procédure de transaction conclue avec l’accord de la Procureure de la République de Paris.

VIGILANCE ACCRUE SUR LES LABELS ET LA TRANSPARENCE

Pour cette période 2023-2024, la DGCCRF a particulièrement visé les produits labellisés. 

Réitérant sa volonté de lutter contre «  l’utilisation abusive de labels » ou les «  labels autoproclamés  », la DGCCRF rappelle l’obligation pour les entreprises qui se prévalent de labels de disposer des justificatifs pertinents et appelle de ses vœux la mise en place de vérifications par un tiers indépendant qui sera obligatoire dès 2026 en application de la Directive (UE) 2024/825 précitée.

La DGCCRF souligne enfin que de nombreuses pratiques sur lesquelles elle est amenée à enquêter sont susceptibles de relever, non seulement de l’article L121-2 du code de la consommation prohibant les pratiques commerciales trompeuses, mais également de manquements à l’obligation de publication des informations relatives aux qualités et caractéristiques environnementales résultant de l’article L541-9-1 du code de l’environnement à laquelle sont tenus tous les fabricants et importateurs de produits générateurs de déchet lors de la mise sur le marché de leurs produits9.

UN CONTRÔLE RENFORCÉ DE LA DGCCRF POUR 2025-2026

Face à ces constats, la DGCCRF annonce un renforcement de ses contrôles en 2025 et 2026  par la mobilisation de nouvelles sources de signalements, notamment via le site achats-durables.gouv.fr, par une coopération renforcée avec l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) afin de mieux cibler les enquêtes notamment pour l’affichage environnemental textile, et par un partenariat avec l’association QuotaClimat afin de développer un outil de détection du greenwashing dans les médias.

Face à l’intensification des contrôles opérés par la DGCCRF tous secteurs confondus et à l’importance des sanctions et risques encourus, les entreprises doivent faire preuve d’une vigilance accrue quant à la conformité de leurs allégations. Il est recommandé de procéder à un audit de conformité de leurs pratiques à la lumière de la règlementation en vigueur et de celle à venir en transposition de la Directive 2024/845 permet d’identifier les risques et anticiper une sanction. En outre, les entreprises respectueuses de la règlementation disposent de moyens juridiques sans cesse renforcés à l’encontre de concurrents qui s’affranchiraient du respect cette règlementation.