La loi de financement de la sécurité sociale pour l’année 2023 (« LFSS 2023 » ou « LFSS ») a été promulguée le 23 décembre 2022, après avoir été examinée par le Conseil Constitutionnel.

L’accès à la santé, le « bien vieillir » et la poursuite de la société inclusive sont les priorités qui avaient été annoncées par le Gouvernement lors de la publication du projet de texte.

Nous présentons ci-après quelques-unes des mesures adoptées par la loi n° 2022-1616 du 23 décembre 2022.

EXTENSION DU POUVOIR DE PRESCRIPTION DES VACCINS : CONSÉQUENCES SUR L’ASSIETTE DE LA CONTRIBUTION SUR LES DÉPENSES DE PROMOTION DES MÉDICAMENTS (ART. 33) ?

Avant le 7 novembre 2022, les pharmaciens d’officine étaient habilités à administrer les vaccins contre la grippe saisonnière et la Covid-19. A compter de cette date, cette habilitation a été étendue aux vaccins obligatoires et recommandés ainsi qu’à leurs rappels1. L'objectif était de faciliter l'accès aux vaccins et d'améliorer la couverture vaccinale selon le calendrier vaccinal en vigueur. Cette mesure vise également à désengorger les cabinets médicaux.

La LFSS 2023 est venue compléter ce dispositif et a renforcé le rôle du pharmacien en le dotant d’un pouvoir de prescription pour certains vaccins2 dont la liste est fixée par arrêté du ministre chargé de la santé pris après avis de la Haute Autorité de Santé3. Jusqu’alors, ces vaccins devaient obligatoirement avoir fait l’objet d’une prescription médicale en amont, à l’exception des vaccins contre la grippe et contre la Covid-19.

Par ailleurs, la LFSS 2023 a apporté d’autres modifications aux modalités de prescription des vaccins par des professionnels de santé :

  • la création de la compétence de prescription vaccinale pour les infirmiers,
  • l’harmonisation pour les sages-femmes de leurs compétences vaccinales afin de renvoyer au niveau réglementaire la liste des vaccins qu’elles peuvent prescrire et administrer ainsi que l’élargissement des personnes entrant dans leur champ de compétence vaccinal (suppression de la limitation au niveau de la loi du champ de compétence à la femme, aux enfants et à l’entourage de ces derniers),
  • l’extension, pour les pharmacies à usage intérieur (pharmacies qui se situent à l'intérieur d'un établissement de santé ou d’un établissement médico-social) et les laboratoires de biologie médicale, de leur compétence vaccinale à la prescription des vaccins du calendrier des vaccinations.

Ce renforcement de la compétence vaccinale pour les professionnels de santé précités, notamment les pharmaciens d’officine, amène à s’interroger sur les conséquences que ces modifications pourraient avoir s’agissant de la détermination de l’assiette de la contribution sur les dépenses de promotion des médicaments prévue par l’article L. 245-1 du Code de la sécurité sociale (CSS), qui intègre les rémunérations des personnes qui font de la promotion auprès des professionnels de santé prescripteurs (ces derniers étant limités à ce jour par les textes de loi aux médecins, chirurgiens-dentistes et sages-femmes).

HARMONISATION DES RÈGLES RELATIVES AUX CONTRIBUTIONS M ET Z (ART. 18)

Différentes mesures visant à assurer un meilleur équilibre dans la contribution des différents acteurs du marché à la régulation des dépenses des produits de santé ont été adoptées par la LFSS 2023. Ces mesures visent principalement la clause de sauvegarde pour les médicaments (dite « contribution M »).

Fixation des montants de déclenchement des clauses de sauvegarde pour les médicaments et les dispositifs médicaux pour l’année 2022

Le montant M et le montant Z, au-delà desquels les clauses de sauvegarde médicaments et dispositifs médicaux se déclencheront pour l’année 2023, sont fixés respectivement à 24,6 milliards d’euros et 2,21 milliards d’euros.

Mise en cohérence de l’assiette de la contribution M

Jusqu’à présent, l’assiette de calcul du montant M ne prévoyait pas l’inclusion des médicaments dont la prise en charge est assurée par l’Etat en vue de la constitution d’un stock stratégique face aux menaces sanitaires graves (achats réalisés par Santé Publique France). Pour les contributions dues au titre de l’année 2024 et des années suivantes, ces médicaments seront désormais inclus dans l’assiette de calcul du montant M (CSS, art. L. 138-10, II, 6°). Cette mesure est justifiée par l’objectif de la clause de sauvegarde de réguler l’ensemble des dépenses d’assurance maladie relatives aux médicaments.

Par ailleurs, sont désormais inclus dans l’assiette de la contribution M les médicaments pris en charge au titre de l’article L. 162-23-6 du CSS, c’est-à-dire les spécialités pharmaceutiques prises en charge en sus des prestations des établissements aux activités de soins de suite et de réadaptation.

Ajout d’une part en accroissement pour le calcul de la contribution M

La LFSS 2023 a modifié la répartition de la clause de sauvegarde qui ne sera plus exclusivement fondée sur le prorata des chiffres d’affaires mais inclura, à hauteur de 30 %, la prise en compte de l’évolution du chiffre d’affaires des entreprises par rapport à l’année précédente (CSS, art. L. 138-12).

La nouvelle version de l’article L. 138-12 du CSS précise que les entreprises créées depuis moins d’un an ne seront pas redevables de la part de la contribution répartie en fonction de la progression du chiffre d’affaires, sauf si la création résulte d’une scission ou d’une fusion d’une entreprise ou d’un groupe.

Par ailleurs, pour la contribution due au titre de l'année 2023, il est prévu, qu’à titre dérogatoire et exceptionnel, la clause de sauvegarde sera plafonnée à 10 % du chiffre d’affaires de chaque entreprise réduit du montant des remises versées (ce plafond est inférieur à celui prévu par l’article L. 138-12 du CSS qui correspond à 10 % du chiffre d’affaires total de chaque entreprise au titre de l’ensemble des médicaments du portefeuille).

Fiabilisation de la procédure de recouvrement de la contribution M

Le calcul de la contribution M dépend de la somme des chiffres d’affaires individuels réalisés par les laboratoires qui en sont redevables. Ainsi, les déclarations tardives du chiffre d’affaires entraînent des difficultés dans la gestion et le recouvrement de la contribution M.

La LFSS 2023 a apporté quelques modifications visant à fluidifier le processus de déclaration et à inciter les entreprises à respecter les délais de déclaration.

La date de déclaration de leur chiffre d’affaires par les laboratoires auprès de l’URSSAF reste fixée au 1er avril de l’année suivante. Ces déclarations sont ensuite transmises au CEPS.

Plusieurs nouveautés et échéances sont intégrées dans la procédure relative à la contribution M.

Ainsi, il est désormais prévu que le CEPS communique à l’URSSAF, avant le 15 juillet, les éventuelles différences identifiées par rapport aux données dont il dispose. Le CEPS doit également dans le même délai transmettre à l’ACOSS le montant des différentes remises dues par chaque laboratoire.

L’URSSAF doit informer sans délai les laboratoires concernés des différences signalées par le CEPS afin que ceux-ci puissent corriger leur déclaration de chiffre d’affaires, le cas échéant, dans un délai de quinze jours.

Les organismes chargés du recouvrement de la contribution sont tenus de notifier à chaque entreprise, au plus tard le 1er octobre, le montant de la contribution dont elle est redevable au titre de l’année précédente. La contribution doit être acquittée au plus tard le 1er novembre.

Si une entreprise ne respecte pas la date de déclaration fixée au 1er avril ou le délai de quinze jours dont elle dispose pour corriger sa déclaration, le cas échéant, une majoration forfaitaire est mise à sa charge. Cette majoration est égale à 0,05 % du dernier chiffre d'affaires hors taxes total déclaré par l'entreprise, par période de quinze jours de retard, sans pouvoir être inférieure à 2.000 euros, ni supérieure à 100.000 euros.

AUTRES MESURES DE LA LFSS 2023

Parmi les nombreuses mesures adoptées dans le cadre de la LFSS 2023 intéressant les médicaments, les nouveautés suivantes méritent par ailleurs d’être signalées (art. 54) :

  • Alignement des modalités de déclaration du chiffre d’affaires réalisé au titre des médicaments bénéficiant d’un accès compassionnel sur ceux bénéficiant d’un accès précoce ;
  • Création d’un mécanisme de tarification spécifique pour les médicaments de thérapie innovante ;
  • Mise en place de nouvelles remises pour les médicaments qui font l’objet d’une demande de remboursement dans un périmètre d’indications plus restreint que celui dans lequel ils présentent un service médical rendu suffisant – le barème des remises sera fixé par arrêté ;
  • Majoration des remises de 2 % par semaine de retard en cas de défaut de déclaration - un décret détermine les conditions d'application des majorations afin qu'une part minimale du chiffre d'affaires, correspondant aux spécialités et à la période pour lesquelles la déclaration ou l'information fait défaut, ne soit pas soumise à un reversement.

S’agissant des dispositifs médicaux (DM), secteur pour lequel les dépenses de l’assurance maladie présentent un fort dynamisme, la LFSS 2023 prévoit plusieurs nouveaux outils de régulation et de transparence (art. 58), dont notamment :

  • Nouveau cadre juridique pour les conventions de prix des DM ;
  • Dissociation du tarif des DM de celui des prestations éventuellement associées à la mise à disposition de ces DM ;
  • Fixation de la marge de distribution des DM par voie réglementaire ;
  • Mise en place de nouvelles remises pour les DM qui sont inscrits sur la liste prévue à l’article L. 165-1 du CSS pour un périmètre d’indications plus restreint que celui dans lequel ils présentent un service attendu suffisant – le barème des remises sera fixé par un arrêté ;
  • Obligation pour l’exploitant non-fabricant de déclarer auprès des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale le prix d’achat du DM, déduction faite des différentes remises ou taxes en vigueur.

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RÉFÉRENCES

1 Article L. 5125-1-1 A, 9° du code de la santé publique (dans sa version applicable jusqu’au 25 décembre 2022).

2 Article L. 5125-1-1 A, 9° du code de la santé publique (dans sa version applicable depuis le 25 décembre 2022) - le 9° bis ajouté à cet article suite à la LFSS 2023 correspond à l’ancien 9° de l’article L. 5125-1-1 A du CSP (i.e., pouvoir d’administrer les vaccins).

3 La liste des vaccins qui doit être fixée par voie réglementaire n’a pas été publiée à ce jour.