Publié le 28 septembre 2022
Le projet de loi de finances pour 2023 a été publié le lundi 26 septembre. Il s’inscrit dans la continuité du premier quinquennat d’Emmanuel Macron, tout en marquant la fin du « quoi qu’il en coûte ». Comme annoncé dans la presse, la baisse des impôts de production se poursuit avec la suppression de la CVAE. Toutefois, celle-ci ne devrait pas intervenir en une seule et unique fois mais en 2 temps. Son taux serait diminué de moitié en 2023 avant qu’elle ne disparaisse en 2024.
La Commission des finances de l’Assemblée nationale se réunira pour l’examen de la première partie du projet de loi de finances pour 2023 à compter du 4 octobre prochain.
FISCALITÉ DES ENTREPRISES
Suppression en deux temps de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) (art. 5)
La CVAE est une composante de la contribution économique territoriale (CET) due par les personnes physiques ou morales ainsi que par les sociétés non dotées de la personnalité morale qui exercent une activité imposable à la cotisation foncière des entreprises (CFE) (i.e. activité professionnelle non salariée exercée à titre habituel) dont le chiffre d’affaires hors taxes est supérieur ou égal à 500 000 € (CGI, art. 1586 ter, CGI, art. 1447 et 1447 bis).
Le taux « théorique » de la CVAE est fixé à 0,75 % (1,5 % avant l’adoption de la loi de finances pour 2021) pour tous les redevables. Toutefois, en pratique, seules les entreprises dont le CA excède 50 M€ se voient appliquer ce taux. Les entreprises dont le CA est inférieur à 50 M€, qui bénéficient d’un dégrèvement dit « barémique », se voient quant à elles appliquer des taux variables, aboutissant à une exonération pour les entreprises qui réalisent un CA inférieur à 500.000 € (voir ci-après) (CGI, art. 1586 quater, I).
La CVAE serait supprimée en deux étapes :
■ Les taux de la CVAE due par les redevables au titre de l’année 2023 seraient diminués de 50 % et fixés comme suit :
CA HT | Taux effectif actuel | Taux effectif LF 2021 | Taux effectif PLF 2023 |
---|---|---|---|
CA inf. à 500 000 € |
0 % | 0 % | 0 % |
CA compris entre 500 000 € et 3 M€ |
0,5 % × (CA - 500 000 €) / 2,5 M€ |
0,25 % × (CA - 500 000 €) / 2,5 M€ |
0,125 % × (CA - 500 000 €) / 2,5 M€ |
CA compris entre 3 M€ et 10 M€ |
0,5 % + 0,9 % × (CA - 3 M€) / 7 M€ |
0,25 % + 0,45 % × (CA - 3 M€) / 7 M € |
0,125 % + 0,225 % × (CA - 3 M€) / 7 M€ |
CA compris entre 10 M€ et 50 M€ | 1,4 % + 0,1 % × (CA – 10 M€) / 40 M€ |
0,7 % + 0,05 % × (CA – 10 M€) / 40 M€ |
0,35 % + 0,025 % × (CA – 10 M€) / 40 M€ |
CA sup. à 50 M€ | 1,5 % | 0,75 % | 0,375 % |
Pour l’année 2023, les entreprises dont le chiffre d’affaires est inférieur à 2 M€ bénéficieraient d’un dégrèvement de 250 € (contre 500 € en 2022) (CGI, art. 1586 quater, II). Par ailleurs, pour les entreprises dont le chiffre d’affaires excède 500 000 €, le montant de la cotisation ne pourrait être inférieur à 63 € (contre 125 € en 2022).
Le taux de la taxe additionnelle à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises serait augmenté pour compenser la baisse de moitié du taux de la CVAE, son montant reste donc inchangé (CGI, art. 1600, II, 2°).
La diminution du taux de la CVAE va impacter la contribution économique territoriale dont le montant est plafonné en fonction de la valeur ajoutée de chaque entreprise (définie, pour l’heure, à l’article 1586 sexies A du CGI).
Pour la CFE due au titre de 2023, le taux de plafonnement, aujourd’hui fixé à 2 %, serait fixé à 1,625 % de la valeur ajoutée (CGI, art. 1647 B sexies).
■ En 2024, la CVAE serait purement et simplement supprimée
Toutefois, la cotisation foncière des entreprises resterait plafonnée au taux de 1,25 % de la valeur ajoutée produite au cours de l’année au titre de laquelle l’imposition est établie ou au cours du dernier exercice de douze mois clos au cours de cette même année lorsque cet exercice ne coïncide pas avec l’année civile (CGI, art. 1647 B sexies, I bis nouveau).
Les dispositions de l’article 1586 sexies, qui définissent le chiffre d’affaires et la valeur ajoutée, seraient transposées à l’article 1647 B sexies A nouveau du CGI.
Cette suppression progressive de la CVAE serait compensée, pour les collectivités territoriales, par une affectation, à compter de 2023, d’une fraction de la TVA.
FISCALITÉ DES PARTICULIERS
Indexation sur l’inflation du barème de l’IR 2022 (art. 2)
Les tranches de revenus du barème de l’IR, ainsi que les seuils et limites qui lui sont associés, seraient alignés sur la prévision d’évolution de l’indice des prix à la consommation hors tabac de 2022 par rapport à 2021, soit 5,4 %. Les limites des tranches de revenus des grilles de taux par défaut du prélèvement à la source (PAS) seraient ajustées en fonction de l’évolution du barème de l’IR, pour les revenus perçus ou réalisés à compter du 1er janvier 2023.
Aménagement du prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu : amélioration de la contemporanéisation et simplification pour les employeurs étrangers (art. 3)
Afin de supprimer le décalage d’une année entre la perception des revenus et le paiement de l’impôt sur le revenu correspondant, le législateur a instauré, depuis le 1er janvier 2019, un prélèvement à la source, contemporain de la perception des revenus (CGI, art. 204 A).
Deux « améliorations » du mécanisme du prélèvement à la source seraient introduites :
■ Abaissement de 10 % à 5 % du seuil d’écart à partir duquel un contribuable est autorisé à moduler à la baisse le montant de son prélèvement (à compter du 1er janvier 2023)
Le montant du prélèvement peut être modulé à la hausse ou à la baisse sur demande du contribuable (CGI, art. 204 J, I). Pour l’heure, la modulation à la baisse du prélèvement n'est toutefois possible que si « le montant du prélèvement estimé par le contribuable au titre de sa situation et de ses revenus de l'année en cours est inférieur de plus de 10 % au montant du prélèvement qu'il supporterait en l'absence de cette modulation » (CGI, art. 204 J, III, 1).
A compter du 1er janvier 2023, le seuil d’écart permettant la modulation à la baisse serait abaissé à 5 %.
■ Simplification des modalités de mise en œuvre du prélèvement à la source sur les salaires de source française versés par un employeur étranger à un résident de France ne relevant pas d’un régime obligatoire de sécurité sociale français
Les salaires tirés d’une activité exercée en France par un contribuable fiscalement domicilié en France pour le compte d’un employeur étranger sont en principe imposables en France où ils sont soumis à une retenue à la source (BOI-IR-PAS-10-10-10, n° 60).
A compter du 1er janvier 2023, ces salaires de source française ne seraient plus soumis au régime de la retenue à la source mais relèveraient du prélèvement à la source selon le système de l’acompte, lorsque ces revenus sont versés :
- par un employeur établi hors de France dans un État membre de l’UE ou dans un autre État ou territoire ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales ainsi qu’une convention d’assistance mutuelle en matière de recouvrement1 et qui n’est pas un État ou territoire non coopératif au sens de l’article 238-0 A ;
- à des salariés qui ne sont pas à la charge, pour les périodes au titre desquelles ces revenus sont versés, d’un régime obligatoire français de sécurité sociale ou à des salariés qui sont à la charge, d’un régime obligatoire français de sécurité sociale en application des dispositions du I de l’article L. 380-3-1 du code de la sécurité sociale. Sont plus particulièrement visés les frontaliers résidents de France recourant de façon accrue au télétravail.
Ces employeurs seraient soumis à une obligation spéciale de déclaration des informations relatives au montant net imposable à l’impôt sur le revenu de ces revenus.
En cas de non-respect de cette obligation déclarative, les déclarants seraient soumis à une amende qui, sans pouvoir être inférieure à 500 € ni supérieure à 50 000 € par déclaration, serait égale à :
- 5 % des sommes qui auraient dû être déclarées, en cas d’omissions ou d’inexactitudes ;
- 10 % des sommes qui auraient dû être déclarées, en cas de non-dépôt de la déclaration dans les délais prescrits ;
Cette amende ne serait toutefois pas applicable, en cas d’absence d’infraction au cours des trois années précédant celle au cours de laquelle la déclaration devait être souscrite, lorsque l’intéressé a réparé son erreur spontanément avant la fin de la même année.
Cette modification du mode de recouvrement vise à résoudre les difficultés administratives des employeurs étrangers ayant des salariés résidents de France qui ne sont pas à la charge d’un régime obligatoire de sécurité sociale français. N’ayant aucune obligation sociale en France (par exemple en cas d'exercice d'une activité non-substantielle, notamment en cas de télétravail par des frontaliers), ces employeurs n’ont en effet pas recours au canal déclaratif en matière sociale, qui est le même qu’en matière fiscale.
Aménagement du régime fiscal des grands événements sportifs (art. 4)
L’organisation de compétitions internationales récentes a conduit à la mise en œuvre d’un cadre fiscal favorable temporaire, visant à promouvoir l’attractivité de la France, codifié à l’article 1655 septies du CGI – qui assure l’exonération des organismes chargé de l’organisation des compétitions et leurs filiales.
Ce régime fiscal serait pérennisé pour les compétitions pour lesquelles la décision d’attribution à la France est intervenue à compter du 1er janvier 2022 et son champ d’application étendu aux sous-filiales des organismes précités.
Enfin, afin de prévenir les situations de double imposition, les personnes physiques présentes en France aux seules fins de participer aux Jeux Olympiques ou Paralympiques de Paris de 2024 ou à des activités directement liées à leur organisation et qui sont domiciliées fiscalement dans un Etat n’ayant pas conclu avec la France de convention fiscale bilatérale, pourraient bénéficier, sur réclamation, d’un dégrèvement d’impôt sur le revenu pour les rémunérations perçues et les revenus générés dans le cadre de la participation sportive ou de l’exercice d’activités en lien direct avec l’organisation des Jeux.
FISCALITÉ DE L’ÉNERGIE
Adaptation du système fiscal aux exigences de la transition énergétique (art. 7)
Il serait procédé à diverses adaptations du système fiscal aux exigences de la transition énergétique, au travers du renforcement de plusieurs dispositifs fiscaux favorables à la transition énergétique et de la réduction d'avantages fiscaux accordés à certaines activités et usages particulièrement émetteurs. Seraient notamment concernés :
■ le dispositif d'étalement de l'imposition des aides (CGI, art. 42 septies) ;
■ le taux réduit de TVA de 5,5 %, notamment sur les travaux d'amélioration de la qualité énergétique des locaux d'habitation (CGI, art. 278-0 bis A) ;
■ l’exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties au profit des constructions de logements sociaux (CGI, art. 1384 A).
AUTRES MESURES
Suppression de dépenses fiscales dites inefficientes (art. 9)
Il serait procédé à la suppression de plusieurs dépenses fiscales considérées comme inefficientes ou obsolètes :
■ le dispositif de taxation au taux de 10 % des revenus issus des inventions brevetables non brevetées (CGI, art. 238, I, 5°)
■ la réduction d’impôt pour les tuteurs de chômeurs qui créent ou reprennent une entreprise (CGI, art. 200 octies) ;
■ la réduction d’impôt au titre des souscriptions en numéraire au capital d’une société agréée de financement de la pêche artisanale (SOFIPECHE) (CGI, art. 199 quatervicies) ;
■ le dispositif d’étalement des plus-values à court terme réalisées par les entreprises de pêche maritime lors de la cession de navires de pêche ou de parts de copropriété de tels navires avant le 31 décembre 2010 (CGI, art. 39 quaterdecies, 1 quater) ;
■ l’exonération temporaire de l’impôt sur les sociétés en faveur des entreprises créées en Corse dans les secteurs de l’artisanat, de l’industrie, de l’hôtellerie, du bâtiment et des travaux publics (CGI, art. 208 sexies) ;
■ le crédit d’impôt en faveur des maîtres-restaurateurs (CGI, art. 244 quater Q).
INDEX
1 ayant une portée similaire à celle prévue par la directive 2010/24/UE du Conseil du 16 mars 2010 concernant l’assistance mutuelle en matière de recouvrement des créances relatives aux taxes, impôts, droits et autres mesures), y compris si celle-ci est limitée au recouvrement de l’impôt sur le revenu dû au titre de ces traitements et salaires