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DE NOMBREUSES DISPOSITIONS DISPARATES

  

Dans la mosaïque de dispositions édictées par la loi du 16 août 2022 sur le pouvoir d’achat figurent des mesures – plutôt des mesurettes – qui viennent encadrer un peu plus étroitement certains frais bancaires, l’une étant relative aux incidents dus à l’émetteur du paiement, l’autre aux incidents dus à des tiers.

OPÉRATION DE PAIEMENT, PAYEUR ET BÉNÉFICIAIRE…

Avant de les présenter, rappelons qu’il s’agit des incidents intervenus à l’occasion d’une « opération de paiement » et que cette notion, issue d’une ordonnance de 20091, est une notion abstraite qui s’applique à l’utilisation de tous les instruments de paiement qui se passent de support papier, donc en particulier à l’exception du chèque et des effets de commerce qui disposent de leur propre réglementation ; de même, rappelons que cette réglementation, qui se veut neutre au regard de la nature du moyen de paiement, retient les termes génériques de « payeur », c’est-à-dire l’émetteur du paiement , « bénéficiaire », c’est-à-dire bénéficiaire du paiement, et « prestataire de services de paiement », ce qui englobe les établissements spécialisés que sont les banques et les établissements spécialisés de paiement.

LIMITATION DES FRAIS D’INCIDENT DE PAIEMENT EN CAS DE DÉTOURNEMENT PAR UN TIERS DU MOYEN DE PAIEMENT

La première mesure à signaler est relative aux paiements que le titulaire du moyen de paiement n’a pas autorisés. En ce cas, l’établissement doit lui rembourser le montant de l’opération, une seule exception étant prévue, si l’établissement « a de bonnes raisons de soupçonner une fraude de l’utilisateur du service de paiement ». En l’absence d’un tel soupçon, l’établissement doit rembourser au payeur « le montant de l’opération non autorisée immédiatement après avoir pris connaissance de l’opération ou après en avoir été informé, et en tout état de cause au plus tard à la fin du premier jour ouvrable suivant »2.

La loi « pouvoir d’achat », après que certaines associations de défense des consommateurs ont constaté une tactique d’atermoiement de certains établissements, met en place des pénalités qu’elle espère dissuasives : passé le délai légal de remboursement prévu ci-dessus, les sommes produisent intérêt au taux légal majoré de cinq points ; au-delà de sept jours, ce taux est majoré de dix points et au-delà de trente jours, de quinze points. Cette mesure est entrée en vigueur le 18 août 2022, lendemain de la publication de la loi.

LIMITATION DES FRAIS D’INCIDENT DE PAIEMENT EN CAS D’UTILISATION ABUSIVE DU MOYEN DE PAIEMENT

L’autre mesure d’encadrement des frais s’applique aux incidents de paiement dus aux utilisateurs du moyen de paiement (défaut ou insuffisance de provision sur le compte). Leur maximum est plafonné à vingt euros ou au montant de l’incident si celui-ci est inférieur3, mais il semble que certains établissements ont une pratique extensive en prélevant systématiquement ces frais lorsque plusieurs opérations successives interviennent pour la même opération de paiement, par exemple à l’occasion de l’échéance d’un prélèvement automatique présenté plusieurs fois à l’établissement.

Aussi, la loi « pouvoir d’achat » vient-elle limiter les frais prélevables à un seul incident, le premier de la liste. Elle ajoute en effet un alinéa à l’article L. 133-26 du Code monétaire et financier précisant que « lorsque plusieurs demandes de paiement concernant la même opération de paiement ont été rejetées, le prestataire de services de paiement rembourse à l’utilisateur les frais perçus au titre de ces incidents au-delà du montant prélevé au titre du premier rejet ». Mais cette mesure n’entrera en vigueur que le 1er février 2023, donc pour les incidents nés postérieurement à cette date. Question : faudra-t-il tenir compte de la date du premier incident ou de la date de l’un quelconque des incidents postérieurs ? Sans doute la première solution est-elle la plus probable au regard des règles d’application des lois dans le temps.


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INDEX

Loi n°2022-1158 du 16 aout 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat

1Ordonnance n°2009-866 du 15 juillet 2009 relative aux conditions régissant la fourniture de services de paiement et portant création des établissements de paiement, modifié par l’ordonnance n°2017-1252 du 9 août 2017 portant transposition de la directive 2015/2366 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 concernant les services de paiement dans le marché intérieur.

2Article L. 133-18 du Code monétaire et financier.

3Articles L. 133-26 et D133-6 du Code monétaire et financier.


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