Extension de la durée de bénéfice du statut de jeunes entreprises innovantes (art. 11)
Le statut de « jeunes entreprises innovantes » (JEI) est accordé aux PME au sens du droit de l'UE créées depuis moins de 8 ans dont au moins 15 % des charges fiscalement déductibles de l'exercice constituent des dépenses de recherche et dont le capital est détenu à hauteur de 50 % au moins par des personnes physiques (directement ou non) (CGI, art. 44 sexies-0 A). Ce régime a été reconnu comme l'un des outils les plus performants d'incitation à la recherche par la Commission européenne.
Il permet à l'entreprise en cause de bénéficier :
■ d'une période d'exonération totale des bénéfices de 12 mois (IR ou IS), suivie d'une période d'abattement de 50 % de 12 mois également (CGI, art. 44 sexies A),
■ d'une exonération de CFE (CVAE et CFE) et/ou de taxe foncière sur les propriétés bâties si la collectivité territoriale a voté une délibération dans ce sens (CGI, art. 1466 D et art. 1383 D),
■ d'une exonération de cotisations sociales patronales sur les rémunérations des personnels participant à la recherche et
■ d’un remboursement immédiat du crédit d’impôt recherche.
A compter du 1er janvier 2022, les PME créées depuis moins de 11 ans pourront bénéficier de la période d'exonération totale des bénéfices de 12 mois (IR ou IS), suivie d'une période d'abattement de 50 % de 12 mois également ainsi que du remboursement immédiat du CIR (CGI, art. 44 sexies-0 A, 2°). Les entreprises bénéficieront ainsi du statut de jeunes entreprises innovantes pour une durée de 10 ans, contre 7 ans auparavant. Il s’agit ici de répondre aux besoins de certains secteurs, notamment les biotechnologies et le secteur médical, qui développent des projets de recherche nécessitant une durée plus longue pour aboutir.
A ce jour, le régime est ouvert aux entreprises créées jusqu'au 31 décembre 2022.
Par ailleurs, le volet social du dispositif nécessiterait que soit adoptée une mesure de coordination avec l’article 131 de la loi de finances pour 2004 afin d'aligner la durée de l'exonération sociale en conséquence. Une mesure d’adaptation serait également nécessaire s’agissant des exonérations d’impôts locaux.
L’allongement de la durée du statut de JEI permet de corréler les allègements fiscaux et sociaux octroyés pour soutenir le développement de nos start-ups avec la durée réelle de maturation de leurs projets de R&D. Cela est d’autant plus vrai dans le domaine de la santé. Pour autant, à ce stade, la mesure n’est pas pleinement satisfaisante car l’impact de cet allongement sur les allègements sociaux n’est pas clairement défini. Or, pour des entreprises en démarrage d’activité, qui supportent plus de charges qu’elles ne génèrent de chiffre d’affaires, les allègements de charges sociales sont cruciaux. Par ailleurs, en l’état, le texte laisse planer des zones d’ombre quant à son application pour les entreprises existantes.
Crédit d'impôt pour les entreprises ayant conclu des contrats de collaboration avec les organismes de recherche et de diffusion des connaissances (art. 69)
Est instauré un crédit d'impôt égal à 40 % des dépenses facturées par des organismes de recherche et de diffusion des connaissances (ORDC) dans le cadre d'un contrat de collaboration de recherche conclu jusqu'au 31 décembre 2025, sous réserve que ce contrat respecte certaines conditions (CGI, art. 244 quater B bis nouveau).
A noter, ces organismes de recherche doivent répondre à la définition donnée par la communication de la Commission européenne n° 2014/C 198/01 relative à l'encadrement des aides d'État à la recherche, au développement et à l'innovation et être agréés par le Ministre chargé de la recherche selon des modalités définies par décret. Ces ORDC ne doivent pas avoir de lien de dépendance (CGI, art. 39, 12) avec l'entreprise avec laquelle ils contractent.
A noter, ces contrats de collaboration visent un portage commun des projets de recherche par une entreprise et un ou plusieurs organismes de recherche. Ils reposent sur un partage des risques et des résultats liés au projet et se distinguent ainsi de la sous-traitance valorisée dans le cadre du CIR en ce qu’ils établissent un partage des coûts mais ne donnent pas lieu à la facturation d'une marge commerciale. Les droits de propriété intellectuelle ne doivent pas pouvoir être attribués en totalité à l'entreprise. Le contrat devra notamment prévoir que les dépenses facturées par les ORDC au titre des travaux de recherche ne doivent pas excéder 90 % des dépenses totales exposées pour la réalisation des opérations prévues au contrat.
La création de ce crédit d'impôt pour recherche collaborative vise à maintenir un dispositif encourageant la collaboration public-privé dans le domaine de la recherche, dès lors que la suppression, par la LF 2021, du dispositif de doublement d'assiette des dépenses relatives aux opérations de recherche confiées aux organismes publics ou assimilés, dans le cadre du crédit d’impôt recherche, entrera en vigueur au 1er janvier 2022. Cette suppression pourrait se traduire par une diminution des collaborations de recherche public-privé, alors que la recherche partenariale est un axe prioritaire du Gouvernement pour soutenir la recherche française.
A noter, le doublement d’assiette accordé aux organismes publics apparaissait contraire au droit de l’UE et avait fait l'objet d'une plainte formelle de la Commission européenne. La LF 2021 a ainsi aligné le régime des opérations confiées aux organismes publics sur celui prévu pour celles réalisées par des sous-traitants privés.
Ce nouveau crédit d’impôt est ouvert aux dépenses facturées au titre des contrats de collaboration conclus à compter du 1er janvier 2022.
Les dépenses éligibles sont afférentes à des travaux de recherche localisés au sein de l'UE ou dans un autre État partie à l'accord sur l'EEE ayant conclu avec la France une convention d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales.
Les opérations de recherche doivent être réalisées directement par les ORDC avec lesquels les entreprises ont conclu un contrat de collaboration. Par dérogation, le recours à d'autres ORDC agréés dans les mêmes conditions sera possible pour la réalisation de certains travaux nécessaires à ces opérations, lorsque cela est prévu au contrat.
Calcul du crédit d'impôt
Le taux du crédit d'impôt est fixé à 40 %. Il est porté à 50 % pour les entreprises qui satisfont à la définition de PME au sens du droit de l'UE.
Sont prises en compte, dans l'assiette du crédit d'impôt, dans la limite globale de 6 M€ par an, les dépenses facturées par les ORDC pour la réalisation des opérations de recherche scientifique et technique prévues au contrat.
A noter, ces sommes ne peuvent pas être prises en compte à la fois dans la base de calcul du crédit d'impôt et dans celle d'un autre crédit d'impôt ou d'une autre réduction d'impôt.
A noter, la charge afférente à ces dépenses est prise en compte pour la détermination du résultat imposable à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés de l'entreprise dans les conditions de droit commun.
Ces dépenses doivent être minorées, le cas échéant, de la quote-part des aides publiques reçues par les organismes concernés au titre de ces mêmes opérations.
Les aides publiques reçues par les entreprises à raison des opérations ouvrant droit au crédit d'impôt sont quant à elles déduites des bases de calcul du crédit d'impôt, qu'elles soient définitivement acquises par elles ou remboursables. Lorsqu'elles sont remboursables, elles sont ajoutées aux bases de calcul du crédit d'impôt de l'année au cours de laquelle elles sont remboursées à l'organisme qui les a versées.
Utilisation du crédit d'impôt
Le crédit d'impôt est imputé sur l'impôt sur les sociétés dû par le contribuable au titre de l'exercice au cours duquel les dépenses de recherche prises en compte pour le calcul du crédit d'impôt ont été facturées par l'ORDC (CGI, art. 199 ter B bis nouveau et art. 220 B bis nouveau). L'excédent de crédit d'impôt constitue au profit de l'entreprise une créance sur l'État d'égal montant. Cette créance est utilisée pour le paiement de l'impôt sur le revenu dû au titre des trois années suivant celle au titre de laquelle elle est constatée. Elle est ensuite éventuellement remboursée à l'expiration de cette période pour la fraction non utilisée.
La créance résultant de l'excédent de crédit d'impôt est toutefois immédiatement remboursable lorsqu'elle est constatée par certaines entreprises (entreprises nouvelles sous certaines conditions, entreprises bénéficiant du statut de jeunes entreprises innovantes, entreprises ayant fait l'objet d'une procédure de conciliation ou de sauvegarde, d'un redressement ou d'une liquidation judiciaires, micro-entreprise et PME au sens du droit de l'UE).
A noter, cette créance est inaliénable et incessible, sauf dans certaines situations (i.e. bordereau Dailly).
S'agissant des sociétés de personnes mentionnées aux articles 8 et 238 bis L ou de certains groupements qui ne seraient pas soumis à l'impôt sur les sociétés, le crédit d'impôt peut être utilisé par les associés proportionnellement à leurs droits dans ces sociétés ou ces groupements.
A noter, la fraction du crédit d'impôt correspondant aux parts des personnes physiques (autres que celles exerçant leur activité professionnelle dans le cadre d'une société de personnes) n’est ni imputable, ni restituable.
Un décret fixera les conditions d'application de ce dispositif et l'adaptera aux cas d'exercices de durée inégale ou ne coïncidant pas avec l'année civile.
Par ailleurs, le bénéfice du crédit d'impôt est subordonné au respect du régime cadre exempté de notification n° SA.58995 relatif aux aides à la recherche, au développement et à l'innovation pour la période 2014-2023, pris sur la base du règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d'aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité.
Enfin, il est précisé qu’en cas de fusion ou d'opération assimilée intervenant au cours de cette période, la fraction de la créance n'ayant pas encore été imputée par la société apporteuse sera transférée à la société bénéficiaire de l'apport.
Mesures de coordination
Plusieurs mesures de coordinations sont également instaurées, parmi lesquelles :
■ La société mère est substituée aux sociétés du groupe pour l'imputation sur le montant de l'impôt sur les sociétés dont elle est redevable au titre de chaque exercice, des crédits d'impôt en faveur de la recherche collaborative dégagés par chaque société du groupe (CGI, art. 223 O, 1, b bis),
■ Le seuil de 100 M€ de dépenses de recherche, permettant l'application du taux du crédit d'impôt recherche de 30 % est apprécié en prenant en compte les dépenses ouvrant droit au crédit d'impôt recherche (à l'exception de celles ouvrant droit au crédit d'impôt innovation) et les dépenses ouvrant droit au crédit d'impôt en faveur de la recherche collaborative,
■ L'extension du comité consultatif du crédit d'impôt recherche au crédit d'impôt en faveur de la recherche collaborative (CGI, art. 1653 F),
■ La prise en compte des sommes facturées par les organismes de recherches pour le calcul du ratio de dépenses de recherche utilisé pour apprécier le statut de jeune entreprise innovante (CGI, art. 44 sexies-0 A),
La possibilité d'interroger l'Administration ou les services relevant du Ministre chargé de la recherche afin de s'assurer que son projet de recherche ouvre droit au crédit d'impôt en faveur de la recherche collaborative et de se prévaloir de l'absence de réponse (LPF, art. L. 80 B).
L’instauration du CICO vise clairement à compenser la suppression du doublement dans l’assiette du CIR des dépenses de R&D confiées à des organismes de recherche publics. Il devrait principalement s’appliquer dans le domaine de la recherche médicale au sein duquel le partenariat public/privé est particulièrement important. Domaine très dynamique puisque 52 % des sociétés émergentes dans ce secteur sont issues des travaux de la R&D publique. Comme toutes nouvelles mesures, les commentaires qui l’accompagneront sont très attendus pour en préciser les contours et les modalités d’application.
Crédit d'impôt innovation en faveur des PME : prorogation et mise en conformité avec le droit de l'Union européenne (art. 83)
Certaines dépenses d'innovation exposées par les PME au sens du droit de l'UE (règlement européen n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d'aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité (RGEC)) ouvrent droit à crédit d'impôt égal à 20 % des dépenses éligibles, dans la limite annuelle globale de 400 000 euros, soit un montant maximum de 80 000 euros (CGI, art. 244 quater B, II, k). Ce taux est porté à 40 % pour les dépenses exposées dans des exploitations situées dans un département d'outre-mer.
Pour mémoire, les PMEs au sens du droit de l'UE s'entendent de celles dont l’effectif salarié est inférieur à 250 salariés et dont le chiffre d’affaires annuel est inférieur à 50 millions d’euros ou dont le total du bilan est inférieur à 43 millions d’euros.
Prorogation du dispositif de deux ans
Les dépenses exposées jusqu'au 31 décembre 2024 – et non plus jusqu'au 31 décembre 2022 – pourront bénéficier de ce crédit d’impôt.
Fin de la prise en compte du forfait pour dépenses de fonctionnement dans l'assiette
Par ailleurs, à compter du 1er janvier 2023, ne sera plus pris en compte dans l'assiette du CII le forfait relatif aux dépenses de fonctionnement éligibles (correspondant à 75 % des dotations aux amortissements immobilisations affectées à la conception de prototypes ou d’installations pilotes de nouveaux produits et 43 % des dépenses de personnel affectés à de telles opérations de conception ou d'installation). Cette suppression permet de mettre le dispositif en conformité avec le droit de l'Union européenne, « les services de la Commission européenne [ayant] précisé que le mode de calcul forfaitaire retenu pour la prise en compte de certains frais de fonctionnement dans l'assiette du [crédit d'impôt innovation] n'était pas compatible avec le RGEC » (CGI, art. 244 quater B, II, k, 3°).
Hausse du taux du crédit d'impôt
En contrepartie, à compter du 1er janvier 2023, le taux du crédit d'impôt est porté à 30 % (au lieu de 20 % jusqu'alors) (60 % pour les dépenses exposées dans des exploitations situées dans un département d'outre-mer au lieu de 40 % actuellement). Le montant maximum de crédit d’impôt pouvant être déclaré par une entreprise sera donc porté à 120 000 euros (240 000 euros pour les DOM).
Depuis 2019, le CII était en sursis et sa prorogation conditionnée par l’évaluation de son efficacité. L’allongement du dispositif jusqu’à fin 2024 est donc une bonne nouvelle pour la dynamique R&D en France mais également pour ces bénéficiaires dont le nombre ne cesse de croître (+ 9 % en moyenne par an avec 8 500 bénéficiaires en 2019). Cette bonne nouvelle n’est pas ternie par la suppression des dépenses de fonctionnement dans son assiette puisqu’elle est compensée par l’augmentation de son taux. De manière générale, le CII devrait rester très incitatif.