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AMÉNAGEMENT DES TRANSMISSIONS UNIVERSELLES DE PATRIMOINE (ART. 5 BIS)

L’article 5 bis du PLF 2023 propose de clarifier la rédaction de la dispense de taxation à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) des opérations de transmission universelle de patrimoine (TUP) prévue à l’article 257 bis du Code général des impôts (CGI), suite à une récente décision du Conseil d’Etat.

En effet, cet arrêt du 31 mai 2022 (n° 451379, SA Anciens établissements Georges Schiever et fils) a mis en lumière la transposition imparfaite des dispositions de la directive TVA en droit interne. L’actuelle rédaction laissait penser que les opérations exonérées de la TVA ou intervenant à l’occasion d’une TUP effectuée à titre gratuit étaient exclues du premier alinéa de l’article 257 bis du CGI qui prévoit la dispense de taxation.

Le dispositif de l’article 5 bis vise par conséquent à donner toute sa portée utile aux dispositions de la directive TVA en droit national, en considérant que le cédant :

■    N’est tenu à aucune facturation et collecte de TVA au titre des livraisons ou des prestations intervenant à l’occasion de la transmission ;

■    N’est pas tenu aux régularisations de la TVA qu’il a pu initialement déduire au titre des biens faisant partie de l’universalité transmise, en cas de TUP effectuée à titre gratuit ou en exonération.

L’exposé des motifs précise qu’il serait sans incidence sur la pratique constante du dispositif de l’article 257 bis du CGI par les entreprises et l’Administration depuis son introduction en 2006 mais qu’il permettrait notamment aux livraisons d’immeubles achevés depuis plus de cinq ans qui sont exonérées de la TVA de bénéficier de ce régime. Ce faisant, l’article 5 bis sécuriserait le dispositif qui avait été mis à mal par le Conseil d’Etat.

Transmission de patrimoine et TVA

EXONÉRATION EN CAS DE CATASTROPHES (ART. 5 TER)

L’article 5 ter a pour objet de transposer les dispositions de l’article 101 bis de la directive TVA, qui permet aux États membres d’exonérer les acquisitions intracommunautaires et livraisons des biens distribués ou mis gratuitement à la disposition des victimes de catastrophes.

Ce dispositif est subordonné à l’exonération des importations de ces mêmes biens par une autorisation expresse de la Commission européenne, comme cela a été le cas en avril 2020 dans le contexte de la pandémie de COVID-19 (décision n° 2020/491 du 3 avril 2020) ou, plus récemment, dans le contexte de la guerre en Ukraine (décision n° 2022/1108 du 1er juillet 2022).

Cette transposition permettrait de garantir une égalité de traitement, au regard de la TVA, entre les produits importés et ceux fabriqués en France ou dans un autre pays européen, prévenant ainsi d’éventuelles distorsions de concurrence injustifiées.

 

 

TAUX RÉDUITS SUR LES DENRÉES ALIMENTAIRES ET LES PRODUITS AGRICOLES (ART. 5 QUINQUIES)

L’article 5 quinquies prévoit de rationaliser l’application du taux réduit de 5,5 % de la TVA dans le secteur de l’agroalimentaire et de la production agricole, en alignant le taux applicable aux produits agricoles et d’alimentation animale sur le taux de 5,5 % applicable en matière d’alimentation humaine.

Selon l’exposé des motifs, la mesure se justifie, notamment, par le fait que la différence de taux entre les produits de la filière alimentaire humaine et les intrants agricoles peut créer pour le secteur agricole, des charges de trésorerie résultant du différentiel de taux entre certains achats soumis au taux de 10 % (animaux vivants) et certaines ventes soumises au taux de 5,5 % (animaux morts destinés à la consommation humaine).

Ainsi, à compter du 1er janvier 2023, le taux de 5,5 % s’appliquerait :

■    aux produits destinés à la consommation d’animaux eux-mêmes producteurs d’aliments pour les humains ;

■    aux produits d'origine agricole, de la pêche, de la pisciculture ou de l’aviculture, dès lors qu’ils sont d’un type normalement destiné à être utilisé dans la production agricole.

 

 

FACTURATION ÉLECTRONIQUE ET CONSERVATION DES DOCUMENTS (ART. 5 SEXIES)

Dans le contexte de la généralisation de la facturation électronique entre assujettis à la TVA établis en France conduit, l’article 5 sexies prévoit, d’une part, d’actualiser les méthodes de sécurisation des factures émises sous forme électronique et, d’autre part, de clarifier leurs modalités de conservation.

En effet, la directive n° 2010/45/UE cite trois exemples de procédures ou de technologies permettant de garantir l’authenticité de l’origine, l’intégrité du contenu et la lisibilité des factures électroniques. Il s’agit de la signature électronique, la piste d’audit fiable et l’échange de données informatisées. La directive n’interdit pas le recours à d’autres technologies ou à d’autres procédures dès lors que celles-ci respectent les conditions précitées.

Par ailleurs, le règlement n° 910/2014 sur l’identification électronique et les services de confiance pour les transactions électroniques au sein du marché intérieur, dit « eIDAS », prévoit l’utilisation du cachet électronique qualifié et lui attribue le bénéfice d’une présomption d’intégrité des données et d’exactitude de l’origine des données auxquelles le cachet électronique qualifié est lié.

Pour cette raison, à l’occasion de la généralisation de la facturation électronique, l’article visé introduirait cette nouvelle méthode de sécurisation des factures dans le Code général des impôts.

Enfin, compte tenu du développement de l’usage des moyens informatiques et de l’évolution des moyens de stockage des données informatiques, l’article 5 sexies prévoit également :

■    la conservation des documents électroniques sur un support informatique, uniquement lorsque les documents sont émis ou reçus sur support informatique ;

■    la durée de conservation de ces documents sera identique à celle prévue pour les documents papier.

Ces dispositions entreraient en vigueur à compter de la publication de la loi de finances pour 2023 et s’appliqueraient aux documents et pièces établis à compter de cette même date.

Evolution du taux de TVA applicable aux produits destinés à la lutte contre l'épidémie de Covid-19

PROLONGATION DU TAUX RÉDUIT APPLICABLE AUX PRODUITS DESTINÉS À LA LUTTE CONTRE L'ÉPIDÉMIE DU COVID-19 (ART. 5 SEPTIES)

Dans le contexte de crise sanitaire de 2020, la loi de finances rectificative pour 2020 avait abaissé à 5,5 % le taux de la TVA applicable aux masques, tenues de protection et produits destinés à l’hygiène corporelle adaptés à la lutte contre la propagation du Covid-19.

Initialement applicable jusqu’au 31 décembre 2021, ce taux réduit a été prolongé une première fois jusqu’au 31 décembre 2022 dans le cadre du projet de loi de finances pour 2022.

En raison de la recrudescence des contaminations et de l’importance des gestes barrières – au titre desquels figure notamment le port du masque, cet article propose de prolonger pour une année supplémentaire le taux réduit de 5,5 % de TVA applicable aux produits adaptés à la lutte contre la propagation du Covid-19, soit jusqu’au 31 décembre 2023.

 

 

RATIONALISATION DU TAUX RÉDUIT DE 5,5 % APPLICABLE AUX TRAVAUX DE RÉNOVATION ÉNERGÉTIQUE (ART. 5 SEPTIES)

L’article 5 septies prévoit l’actualisation et la rationalisation du champ d’application du taux réduit de la TVA de 5,5 % aux travaux de rénovation énergétique des logements ainsi qu’aux travaux de pose, d’installation et d’entretien des infrastructures de recharge pour véhicules électriques dans les locaux d’habitation.

Il s’agirait de clarifier le champ d’application du taux réduit de TVA applicable aux travaux d’amélioration énergétique. L’assiette de la TVA serait plus lisible pour les professionnels et les particuliers, ce qui devrait faciliter la compréhension de ce dispositif. Cette rationalisation s’effectuerait d’ici au 1er janvier 2024, avec la prise d’un arrêté après concertation avec les filières professionnelles concernées. 

 

 

AJUSTEMENTS TECHNIQUES RELATIFS AUX DERNIÈRES RÉFORMES (ART. 10 QUINQUIES)

L’article 10 quinquies procèderait à plusieurs mesures techniques nécessaires à la bonne application des réformes récentes intervenues en matière de TVA :

■    S’agissant des obligations du groupe TVA, la date à laquelle le représentant de l’assujetti unique communique annuellement la liste de ses membres serait avancée du 31 janvier au 10 janvier, à compter du 1er janvier 2024 afin d’introduire une simplification informatique dans la mise à jour des données fiscales de chacun des membres du groupe de TVA. En effet, cela permettrait, notamment, en cas de nouveaux membres, de prendre en compte le fait qu’ils n’ont plus à déclarer la TVA, désormais déclarée et payée par l’assujetti unique ;

■    Le transfert à la DGFiP de la gestion des régimes suspensifs de TVA à compter du 1er janvier 2022 a rendu obsolètes certaines dispositions relatives à la communication d’informations par l’ancien gestionnaire de ces régimes ;

■    Enfin, il est également proposé que les contribuables bénéficiant de la franchise en base de la TVA puisse être exemptés, conformément aux dispositions de la directive TVA, de l’obligation de dépôt des états récapitulatifs des clients pour les livraisons de biens.

OBLIGATION POUR LES PRESTATAIRES DE SERVICES DE PAIEMENT (PSP) DE TENIR DES REGISTRES DE PAIEMENTS TRANSFRONTALIERS (ART. 10 SEXIES)

L’article 10 sexies a pour objet de transposer les dispositions de la directive (UE) 2020/284 du Conseil du 18 février 2020 qui, à des fins de lutte contre la fraude à la TVA, instaure, à compter du 1er janvier 2024, l’obligation pour les prestataires de services de paiement (PSP) de tenir des registres de paiements transfrontaliers et de les mettre à la disposition de l’administration.

Les données relatives aux paiements réalisés par les clients des entreprises qui ne sont pas établies dans l’État membre où la TVA est due, détenues par les PSP et mises à la disposition de l’administration, seraient agrégées, traitées et mutualisées au niveau européen, permettant ainsi aux États membres d’identifier les entités défaillantes et de lutter plus efficacement contre ces pratiques.

 

 

INVALIDATION DU NUMÉRO TVA DANS LE CAS DE LA PARTICIPATION À UNE FRAUDE (ART. 10 OCTIES)

À compter du 1er janvier 2023, l’article 10 octies compléterait les dispositions de l’article L. 10  BA du Livre des procédures fiscales afin de renforcer les moyens dont dispose la direction générale des finances publiques (DGFiP) en matière de lutte contre la fraude à la TVA, en prévoyant la possibilité de procéder à l’invalidation du numéro individuel d’identification à la TVA, dans le cas de la participation de l’assujetti à une fraude, notamment de type « carrousel ».

Cette invalidation du numéro de TVA devrait être fondée sur une situation objective ou établie sur la base d’un faisceau d’indices par l’administration fiscale. Elle pourrait également s’appliquer en cas d’absence de désignation d’un représentant fiscal, afin de renforcer l’obligation de désignation d’un tel représentant.

 

 

AMÉNAGEMENT DES MODALITÉS DE CONTRÔLE DES GROUPES TVA ET DE LEURS MEMBRES (ART. 10 UNDECIES)

L’article 10 undecies aménagerait les modalités de contrôle des membres d’un groupe TVA en revenant aux dispositions de droit commun. L’administration fiscale devrait communiquer au membre contrôlé les conséquences financières du contrôle telles qu’elles résultent de son appartenance à un assujetti unique et non plus, comme prévu aujourd’hui, sur les montants dont il serait redevable en l’absence d’appartenance à un groupe TVA, sauf pour les livraisons et prestations à un autre membre de cet assujetti unique.

En pratique, la mise en œuvre de cette disposition semble complexe pour l’administration fiscale puisqu’elle nécessite de communiquer une information théorique éloignée de la réalité et de recalculer un coefficient théorique de déduction qui serait celui applicable à la société si elle n’était pas membre d’un assujetti unique à la TVA.

Par ailleurs, le présent article prévoit également de compléter le champ de l’exception à l’interdiction de contrôler deux fois une même période pour le même impôt afin d’inclure, outre son représentant, les membres du groupe TVA. L’exposé des motifs cite l’exemple d’un contrôle opéré chez le représentant unique du groupe TVA qui peut révéler la nécessité de mener des investigations chez un ou plusieurs autres membres ayant déjà fait l’objet d’un contrôle portant sur la TVA pour la même période, notamment dans le cas où ces contrôles sont rendus nécessaires par des rectifications opérées au niveau du représentant du groupe TVA ayant des incidences sur les membres, i.e la modification du coefficient de déduction au niveau du groupe.


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